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    Roger MATHIEU à ATTIGNY (10)

    Le parcours d’un jeune vosgien de vingt ans, réfractaire au S.T.O

     

    Roger MATHIEU est né le 10 avril 1923 à CORNIMONT. Après les études primaires à l’école communale, il obtient son certificat d’études à 13 ans. Après quatre jours de vacances, il entre, comme tisserand, aux établissements textiles des Héritiers Georges PERRIN tissage bien connu à  CORNIMONT.

    En 1941, il quitte cette usine sur les conseils de ses services administratifs qui pensaient à tort ou à raison, que les risques de réquisition par la police de VICHY étaient plus importants dans cette structure. C’est ainsi que de nombreux jeunes gens quittèrent les établissements des Héritiers Georges PERRIN, certains pour travailler en toute discrétion dans des fermes ou chez des artisans.

    Échapper à la réquisition de la police de VICHY et plus tard au Service du Travail Obligatoire : le STO, tel était le souci principal des jeunes français dans ces années 40-44. Le jeune MATHIEU, refusant l’éventualité d’une  réquisition  en vue du travail en Allemagne au profit de la machine de guerre allemande, intégrera la société BRIOT de CORNIMONT, en qualité d’électricien, jusqu’au début de mars 1943, date à partir de laquelle il sera  requis pour le STO en Allemagne.Il décide alors, avec deux camarades requis pour le STO, de rallier le Général De Gaulle afin de rejoindre les Forces Française Libres en Angleterre.

    Après concertation et surtout après y avoir mûrement réfléchi depuis 2 ans, et suivant les conseils de radio Londres, principalement la célèbre émission «  ici radio LONDRES : Les Français parlent aux français », nos 3 jeunes gens décident de rallier Londres via l’Espagne.

    Cette solution qui, aujourd’hui peut étonner les plus jeunes, mais qui dans le contexte de l’époque était la plus crédible et la plus sûre mais pas forcément sans embûches et pas nécessairement la plus simple. Combien, dans cette recherche du chemin de Londres, connurent alors pour de longs mois, internement, prison, camps de concentration, sévices de tous ordres, faim, maladies parfois l’épuisement et la mort dans les geôles espagnoles. Celles-ci dans la majorité des cas, relâchaient nos jeunes patriotes après quelques mois de captivité et les remettaient entre les mains du consul de la France libre.

    Combien de jeunes patriotes français désirant rejoindre les Forces Françaises libres du Général De Gaulle sont passés par cette voie.

    Depuis le débarquement des alliés en Afrique du Nord, les Allemands occupent la France entière. Pour éviter le passage de nombreux jeunes français vers l’Espagne, surtout depuis l’instauration du Service du travail Obligatoire, les Allemands interdisent particulièrement l’approche de la frontière Espagnole. C’est le 19 mars 1943 que nos 3 jeunes patriotes seront arrêtés par la gestapo, à quelques kilomètres, seulement, de la frontière Espagnole.

    Enfermés à Hendaye puis transférés au fort du Hà à Bordeaux, prison sinistrement célèbre, ils subiront des  interrogatoires musclés de la Gestapo. Les SS pensaient que la tentative d’évasion de nos 3 Vosgiens s’inscrivait dans un  ensemble beaucoup plus vaste. La Gestapo voulait leur faire avouer une appartenance à un réseau alors que leur démarche était purement individuelle. !!!

    C’est après 3 semaines d’interrogatoires musclés que la gestapo se rendra à l’évidence et conclura à un acte de résistance individuel et ordonnera leur transfert vers la très célèbre prison  de Compiègne Royallieu, point de regroupement des résistants Français en partance pour les camps de concentration.

    Compiègne Royallieu fut pour les résistants  ce que fut Drancy pour les juifs.

    Le sort de notre jeune patriote en était ainsi jeté. !!!

    Le 6 mai 1943, Roger partira pour un destin qu’il était loin d’imaginer. Entassés dans des wagons à bestiaux, environ une centaine de personnes par wagon, les 1000 internés du convoi débarqueront près de Berlin, après 3 jours d’un voyage sans eau, sans manger, sans lumière, sans sanitaire, vers l’inconnu, vers un univers insoupçonné, voyage dont les conditions laissaient déjà entrevoir les marques de l’inhumanité. !!!

    Notre ami Roger vient de débarquer au camp de concentration d’Orianenburg Sachsenhausen, situé à 35 Kms au nord de Berlin. Il y avait 35000 détenus provenant de tous les horizons  européens et qui étaient destinés, en priorité, à pourvoir la machine de guerre nazie en main d’œuvre. Ils étaient répartis dans 44 Kommandos satellites, créés à proximité des usines ou les déportés étaient astreints au travail forcé de plus de 12 heures par jours sans nourriture et sans soin,Roger est affecté au Kommando Heinkel attaché à la fameuse usine d’aviation du même nom et travaille sur les ascenseurs pour les mitrailleurs sur les avions. Environ 6 à 7000 déportés y travaillaient.

    La pression alliée devient de plus en plus forte, les forces de l’axe perdent petit à petit leur suprématie. Pour les détenus des camps de concentration, en plus des privations, des fatigues accumulées par les travaux forcés, des brimades de toutes sortes, ils subissent indirectement cette pression des alliés à travers les bombardements destinés à démanteler la machine de guerre allemande. Ces bombardements feront de nombreux morts et blessés parmi  la population des déportés : plus de 250 morts à la suite des bombardements de l’usine Heinkel du 22 avril 1944. Paradoxe suprême, ces derniers étaient redoutés certes mais aussi ardemment souhaités car d’eux pourrait venir le salut.

    Le 12 juillet 1944, il est envoyé sur Dachau son numéro est le 80 497 qu’il a dû apprendre en 2 jours à le prononcer en allemand obligatoirement. Encore maintenant, il le prononce en allemand afin de pouvoir le dire en français.

    Après 3 semaines, il est incorporé au kommando de travail Hofburg à la fabrication de pièces pour les V2. Il y restera jusqu’à  sa libération par les Américains, après avoir connu la marche de la mort du 21 au 27 avril 1945, au cours de laquelle bon nombre de ses camarades sont morts d’épuisements. Il faisait alors 34 Kgs et durant une dizaine de jours il est devenu amnésique, 75 ans après, il ne se souvient toujours pas de ce qu’il a fait durant ces 10 jours. !!!

    Le travail dans les usines permettait aux déportés de côtoyer des civils allemands qui étaient informés du déroulement de la guerre et immanquablement, certains en informaient les déportés.C’est ainsi qu’ils ont appris le débarquement des alliés du 6 juin 1944  en Normandie. Cette formidable nouvelle représentait, pour les déportés une grande lueur d’espoir car, « Sans espoir, point de salut »

    Après avoir été libéré et pris en charge par les services sanitaires américains, ce groupe de 10 est resté dans un village allemand pendant un mois à attendre. !!! Toujours soignés et à la charge des amis américains.

    Puis par hasard, le chef d’un camion de la Croix Rouge Suisse ayant pour mission de rapatrier des prisonniers français libérés vers la France, a remarqué nos 10 français en tenue rayée de déporté. Après leurs avoir demandé et compris les raisons de leur attente, il décide de les charger sur son véhicule et de les rapatrier  vers Strasbourg où ils seront pris en charge par la Croix Rouge Française. Roger MATHIEU venait de retrouver la France. !!!

    Puis toujours sous le contrôle de la Croix Rouge Française, il est rapatrié sur Nancy d’où il prendra un train pour Épinal, nous sommes le 27 mai 1945.

    Arrivé à la gare, sa tante qui l’attendait dans le hall, bien qu’ayant entendu l’annonce de l’arrivée de son neveu au micro, ne le reconnaîtra pas parmi les voyageurs. Il sera réceptionné par les services médicaux de la Croix Rouge. Après une dernière visite médicale et compte-tenu de l’état de Roger Mathieu, les services sanitaires décident de son départ en urgence vers l’hôpital de Nancy.

    Revoir sa mère, revoir Cornimont qui avaient été ses raisons de résister, de s’accrocher à la vie n’était pas encore pour aujourd’hui.

    Admis en pneumologie, il y sera soigné pendant 4 mois pour une tuberculose très sévère avec ensuite un séjour au sanatorium de Lay St Christophe. Le 6 novembre 1945, il sera dirigé vers celui de Munster, il en sortira le 6 novembre 1946. C’est à cette date qu’il reverra son pays natal après une absence de 3 ans et 10 mois dont plus  de 2 ans en camp de concentration, fait très exceptionnel. !!!

    Revoir Cornimont était devenu une réalité pour lui.

    Roger Mathieu, après de nombreuses hospitalisations et passages devant différentes commissions, a été reconnu grand invalide de guerre et n’a jamais pu reprendre une activité professionnelle.

    En reconnaissance : il est fait Chevalier de  la Légion d’Honneur depuis le 26 janvier 1956 – Médaillé militaire depuis le 18 août 1955 -Lui ont été attribués : la croix de guerre 39/45 avec palme, la croix du combattant volontaire avec agrafe 39/45, la croix du combattant volontaire de la résistance, la croix du combattant et le titre de reconnaissance de la nation.

    Monsieur Roger Mathieu est l’un des 5 survivants  vosgiens des camps concentrationnaires nazis.

    Je voudrais terminer cet article en rendant un vibrant hommage à Roger Mathieu pour ce qu’il a fait pour la France et ses enfants que nous sommes tous. Notre liberté d’aujourd’hui, nous la devons à tous ces jeunes d’hier qui ont dit non au nazisme à la perte de leurs libertés parfois en y perdant la vie. Ne laissons pas cette page de notre histoire tomber dans l’oubli collectif, soyons vigilants et les garants d’une paix durable pour les jeunes générations d’aujourd’hui mais également pour celles de demain qui seront nos enfants, nos petits enfants !!!   

    Hugues DEVAUX Président de la 29 èmesection de la Légion Vosgienne de DARNEY-VOSGES.

    Roger MATHIEU membre de la section de la Légion Vosgienne de Darney et sa fille Martine.

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