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    Le combat contre les Beni-Raten

    D’après « Campagne de Kabylie en 1857 » – Capitaine Eugène Clerc – 1859

     

    De Bougie à Dra-el-Mizan, la grande chaîne rocheuse du Djurjura décrit un arc de cercle, dont la concavité est tournée vers le nord, et partage en deux parties inégales la portion de la grande Kabylie, encore insoumise avant l’expédition de 1857. La plus considérable est tournée au nord vers le Sebaou ; l’autre au sud, vers l’Oued-Sahel.

    Il ne sera question ici que de la partie située sur le versant nord, partie comprise entre la chaîne même et une ligne, qui, partant du col d’Akfadou, contournerait en descendant le pays des Beni-Hidjer, pour suivre ensuite le cours du Sebaou jusqu’à Sikkou-Meddour, remonter l’Oued-Aïssi et se terminer, en passant par Borg-Bogni, à Dra-el-Mizan. C’est là, et particulièrement chez les Beni-Raten, que devaient se passer les principaux événements de. la campagne.

    Limité au nord, par le Sébaou ; à l’ouest, par l’Oued-Aïssi ; à l’est, par l’Oued-Fraonçen ; au sud, par les Menguellat ; le pays des Beni-Raten offre le long du Sébaou une plaine accidentée, d’une largeur variable de deux à trois kilomètres, puis un amas confus de montagnes et de contreforts.

    De toutes les tribus insoumises, la plus forte et la plus remuante était, sans contredit, celle des Beni-Raten. Par le nombre de ses fusils, par sa renommée guerrière, par ses efforts constants pour soutenir l’indépendance commune, elle avait acquis une influence et une supériorité incontestées sur toutes les autres tribus de la Kabylie, et en avait toujours usé pour les pousser à la révolte et à l’insoumission.

    De tout temps, elle avait manifesté son humeur belliqueuse, son amour de l’indépendance et ses sentiments hostiles, en prenant une part active, soit par ses contingents, soit par son argent à toutes les luttes engagées contre nous.

     

    Par un ordre, en date du 12 mai 1857, signé du maréchal Randon général en chef, le corps expéditionnaire était composé :

    - 1° De trois divisions fortes de 7 à 8 000 hommes chacune.
    Première division, général Renault. Deuxième division, général de Mac-Mahon. Troisième division, général Jusuf.

    - 2° De deux colonnes d’observation, de 1 500 hommes chacune.
    Colonne de Dra-el-Mizan, colonel Drouot. Colonne d’Aumale, colonel Dargent.

    - 3° D’une colonne de cavalerie de 500 hommes dans la vallée du Sebaou, colonel de Fénélon.

    Au début de la campagne, trois sections d’artillerie étaient attachées à chaque division, savoir : une section d’obusiers rayés, une section d’obusiers de montagne et une section de fuséens.

    Plus tard, l’artillerie de la division de Mac-Mahon était augmentée d’une section d’obusiers de montagne et d’une section de canons-obusiers, tirées de la réserve ; ce qui portait le nombre des sections de cette division à cinq.

    Une section d’obusiers de montagne à chaque colonne d’observation.

    Trois sections étaient en réserve à Tizi-Ouzou, savoir : une section de canons-obusiers et deux sections d’obusiers de montagne.

    L’artillerie du corps expéditionnaire était placée sous les ordres du général Devaux, qui avait pour chef d’état-major le commandant Fabre. L’artillerie de la division Renault était commandée par le capitaine Léveillé. L’artillerie de la division de Mac-Mahon, par le capitaine Clerc. L’artillerie de la division Jusuf, par le capitaine Nicolas. La réserve d’artillerie, par le capitaine Rolin.

    La province de Constantine devait fournir, dans le cours de la campagne, une quatrième division, forte de 5 000 hommes (général Maissiat), et une petite colonne formée à Bordg-Bou-Ahéridge, par le colonel Marmier, en grande partie avec des contingents arabes.

    L’artillerie de la division Maissiat, sous les ordres du colonel Lion, était composée d’une section d’obusiers de montagne, d’une section de mortiers de 15 et de deux escadrons de canonniers à pied faisant le service d’infanterie.

    Au jour fixé pour l’attaque générale, le 24 mai, la division de Mac-Mahon, entrant la première en action vers quatre heures et demie, avait enlevé rapidement, malgré de grandes difficultés et une vive résistance, la ligne de défense établie par les Kabyles sur les premières hauteurs, entre Tacheraich et Bolias, pour fermer l’accès de leur pays par la ligne la plus courte.

    Sans s’arrêter à ce premier succès, elle avait poussé hardiment en avant et, à six heures, elle était maîtresse de la position importante d’Afensou, point de jonction assigné aux deux divisions de Mac-Mahon et Jusuf. Vers sept heures, elle occupait la position d’Imaïseren , dominait le plateau de Souk-El-Arba, et se maintenait dans ces positions menaçantes malgré les attaques répétées et opiniâtres des Kabyles.

    La division Jusuf, suivant de près, avait emporté de son côté avec un grand élan la position très forte et très vivement défendue d’Ighil-Guefri ; puis se prolongeant le long de la crête, elle avait occupé les villages de Taguemont et d El-Hadj-Ali. Vers sept heures, elle entrait en communication avec la division de Mac-Mahon, à Afensou.

    Les deux divisions, agissant ainsi de concert et à proximité l’une de l’autre, s’étaient prêté un mutuel appui. La division de Mac-Mahon, par son ascension rapide et sa prompte apparition près d’Afensou, avait inquiété les défenseurs d’Ighil-Guefri. La division Jusuf à son tour, en se présentant devant les hauteurs d’Ighil-Guefri, avait retenu devant elle les défenseurs de la crête, et en l’occupant ensuite, avait assuré les derrières de la division de Mac-Mahon et ses communications avec la plaine par la route d’Ighil-Guefri.

    Quant à la division Renault, agissant isolément contre la fraction populeuse des Irdjen, elle avait de grands obstacles à vaincre, un plus long chemin à parcourir, et devait s’avancer lentement et sûrement, en conservant des communications assurées avec Sikkou-Meddour. C’était là un point important pour l’armée entière, puisque la crête des Irdjen devait devenir, par la suite, la ligne principale de communication.

    Du reste, en agissant ainsi, elle maintenait devant elle les Irdjen, ce qui était un service rendu aux autres divisions, et elle donnait le temps à l’action de ces divisions de se produire et de se faire sentir dans le haut du pays, ce qui ne pouvait que lui être avantageux.

    Pour toutes ces raisons, la division Renault ne se mettait en mouvement qu’une heure plus tard.

    Lorsqu’elle cherchait à gagner les premières hauteurs, elle rencontrait partout une résistance opiniâtre et particulièrement au village de Djemma et à celui de Tiguert-Hala, point dominant du pays qui avait été fortifié. Il fallait de grands efforts pour enlever, et ensuite pour conserver ce point important. La division, continuant son mouvement en avant, emportait ensuite avec la même vigueur les villages voisins de Tamazirt, d’Aït-Saïd et le plateau d’Ouvilel où elle s’établissait vers dix heures et demie.

    A partir de ce moment, et jusqu’au lendemain 25, à midi, elle conservait cette position, repoussant avec succès les retours offensifs des Kabyles. Dans la matinée du 25, pour éloigner l’ennemi, elle l’attaquait sur plusieurs points à la fois, et le chassait des villages voisins d’Ibachiren, d’Aït-Agag, etc. La fusillade ne cessait définitivement que vers midi.

    Ainsi, le plan arrêté par le maréchal avait reçu sur tous les points son entière exécution.

    La division de Mac-Mahon, formant la tête de l’armée, avait pris pied au centre du pays ; la division Jusuf, formant le centre, assurait la position avancée de la division de Mac-Mahon par l’occupation d’Ighil-Guefri, et communiquant par la plaine avec la division Renault, servait de lien entre les trois divisions ; la division Renault, formant la droite et plus tard l’arrière-garde, occupait la crête des Irdjen, depuis Sikkou-Meddour jusqu’à la hauteur d’Azouza, gardant la ligne qui devait relier plus tard toute l’armée à la base des opérations. Les résultats ne devaient pas se faire attendre !

    La journée du 24 mai n’avait été qu’une série de combats brillants pour tout le corps expéditionnaire, et chaque division avait rempli avec le même élan, la tâche qui lui était imposée, en surmontant des résistances énergiques. Mais la division de Mac-Mahon, par les positions importantes qu’elle avait conquises en quelques heures, et qu’elle avait su garder contre toutes les attaques des Kabyles, avait frappé le coup sensible et s’était rendue maîtresse de la situation.

    Dominant le plateau de Souk-El-Arba, arrêtant devant elle les contingents du Djurjura, menaçant par le haut les fractions les plus importantes des Beni-Raten , que les autres divisions pressaient par le bas, elle les avait mis dans l’impossibilité de continuer la lutte, et dans la nécessité de porter au maréchal leurs offres de soumission, dès le 25 au matin.

    Le 25, vers midi, les Kabyles échangeaient des coups de fusils entre eux du côté de Souk-El-Arba, et bientôt après, des offres sérieuses de soumission arrivaient au général de Mac-Mahon, qui les faisait parvenir au maréchal. Les hostilités étaient suspendues, en attendant les conditions définitives de la paix.

    A partir de ce moment (midi), toute fusillade cessait, et la suspension des hostilités était si scrupuleusement observée par les Beni-Raten, qu’on aurait pu se croire immédiatement transporté en pays ami, et qu’on pouvait circuler isolément dans tous les sens, en toute sécurité.

    Le 26, les Beni-Raten acceptaient toutes les conditions imposées par le maréchal et la soumission devenait définitive.

    Un succès si rapide dépassait toutes les espérances et avait un immense retentissement.

    Division Renault : 33 hommes tués et 159 blessés, dont 3 officiers. Total, 192 hommes mis hors de combat.
    Division Jusuf : 3 hommes tués et 34 blessés, dont 1 officier. Total, 37 hommes mis hors de combat.
    Division de Mac-Mahon : 30 hommes tués, dont 1 officier supérieur (le commandant de Rebeval), et 225 blessés, dont 2 officiers. Total, 255 hommes mis hors de combat.

    Les pertes de l’ennemi, d’après son propre aveu, étaient de 1 200 hommes mis hors de combat.

    Les pertes de la division de Mac-Mahon, bien que supérieures à celles des autres divisions, sont faibles, si l’on considère les résultats obtenus. C’est à la vive impulsion imprimée à toutes les opéra- tions, aux mesures prises ensuite pour couvrir les troupes, et à l’emploi fréquent et heureux de l’artillerie, soit pour préparer les attaques, soit pour défendre les positions, qu’il faut attribuer cet heureux résultat. La division Renault avait fait également un emploi très avantageux de son artillerie, pour appuyer ses opérations les plus importantes et avec un plein succès.

     

     

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