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    La bataille d'Essling

     

    La bataille d’Essling

    D’après « Éphémérides militaires depuis 1792 jusqu’en 1815 » – Louis Eugène d’Albenas – 1818

     

    Après les batailles d’Eckmühl et de Ratisbonne, l’armée autrichienne s’était repliée sur Vienne, par les deux rives du Danube. L’armée française la poursuivit par la rive droite, entra le 12 mai dans la capitale de l’Autriche, et essaya aussitôt de passer le fleuve pour marcher à l’ennemi, retiré en entier sur la rive gauche.

    A deux lieues au-dessous de Vienne, vis-à-vis Ebersdorff, sur la rive droite, deux îles séparent en trois branches les eaux du Danube.

    Ce point fut choisi pour établir un pont. Dès le 18 mai, les matériaux nécessaires ayant été réunis, la division du général Molitor passa dans l’île de Lobau, séparée de la rive gauche par le dernier bras, dans des bateaux à rames ; et, le 19, les ponts sur le premier et sur le second bras furent achevés. Le 20, par un troisième pont, on aborda la rive gauche, et les généraux Molitor, Lasalle et Boudet passèrent pendant la nuit le dernier bras, avec leurs divisions.

    Le 21, l’armée continua à filer sur la rive gauche, mais lentement ; la fragilité des ponts ne permettant pas plus de célérité dans sa marche.

    L’ennemi, jusque là, n’avait inquiété ni nos travaux, ni le passage du dernier bras : placé à une lieue au-dessus de nos ponts, il ne s’était pas encore montré ; et, sans obstacles, il nous avait laissé aborder son terrain. Cette inactivité apparente, dans un moment aussi important, indiquait assez quelque embûche de sa part.

    Soit qu’aveuglé, Napoléon ne s’en aperçut pas, soit que, plutôt, il comptât sur le courage de son armée pour vaincre tous les obstacles, nulles précautions ne furent prises pour assurer nos communications avec la rive droite.

    Vers les quatre heures du soir, l’ennemi parut enfin ; et notre avant-garde, la droite placée au village d’Essling, et la gauche à celui de Gross-Aspern, fut aussitôt attaquée. 90 000 Autrichiens, et deux cents pièces de canon, heurtèrent en même temps toute notre ligne , forte seulement de 35 000 hommes.

    On combattit vivement, de part et d’autre, jusqu’à la nuit ; notre cavalerie fit plusieurs belles charges et prit quatorze pièces de canon. Ce fut dans l’une d’elles que fut tué le général d’Espagne, commandant une division de cuirassiers. Malgré leur immense supériorité, les Autrichiens ne purent gagner de terrain. Le maréchal Massena , défendant le village d’Aspern, le maréchal Lannes, celui d’Essling, se maintinrent dans leurs positions, et nous conservâmes intact notre champ de bataille.

    Dans la nuit du 21 au 22, de nouvelles troupes passèrent sur la rive gauche et le 22, nous avions de 45 à 50 000 hommes sur cette rive.

    A quatre heures du matin, l’armée autrichienne s’ébranla, nous attaqua sur toute la ligne, et profitant de sa supériorité numérique, étendit ses ailes afin de nous déborder.

    Napoléon profite alors habilement de ce mouvement de l’ennemi, qui, en affaiblissant son centre, donne la possibilité de le percer.

    Le duc de Montebello, à la tête du corps des grenadiers réunis que commandait le général Oudinot, des divisions Saint-Hilaire et Boudet, quitte la défensive et tombe sur les Autrichiens. Dans ce moment, le duc d’Istrie faisait charger la cavalerie, et le maréchal Masséna attaquait sur notre gauche. Ce terrible choc arrête l’ennemi sur ses ailes, et le fait plier sur son centre : il perd du terrain, et bientôt son mouvement rétrograde prend l’aspect d’une retraite ; un effort de plus, et cette retraite va se changer en une déroute complète.

    Il est neuf heures. De tous côtés, nos soldats demandent des cartouches, et notre artillerie des boulets, pour achever la victoire. Il n’y a plus ni boulets, ni cartouches ; c’est en vain qu’on en cherche de tous côtés ; les ponts sur le Danube sont rompus, et nous n’avons plus de communication avec la rive droite, où sont restés nos parcs de réserve et une partie de l’armée.

    Les stratagèmes et les ruses de guerre sont les armes du faible. Le prince Charles y avait eu recours, ne pouvant nous vaincre à force ouverte.

    Pendant que sur la rive droite, nous faisions nos préparatifs de passage, lui, sur la rive gauche, avait fait préparer de gros bateaux chargés de pierres, de pesants radeaux, de nombreux brûlots, et jusqu’à des moulins placés sur le fleuve, qu’il fit détacher prêts à être lancés.

    Malgré le rapprochement des lieux, ces préparatifs de l’ennemi nous restèrent inconnus, et aucune estacade ne fut placée pour couvrir les approches de nos ponts. Lorsque l’archiduc s’aperçut que la moitié de l’armée française était sur la rive gauche, il laissa aller au gré du courant toutes ces machines préparées, qui, venant heurter les deux ponts qui joignaient l’île Lobau à la rive droite, les rompirent et les détruisirent de manière à rendre impossible toute communication d’une rive à l’autre.

    Faisant alors un grand effort de toute son armée, le général ennemi crut avoir bon marché de nos troupes, restées sur la rive gauche sans munitions, et il comptait déjà les noyer dans le Danube, ou les forcer à capituler ; mais il ne sut pas achever de vaincre, et la valeur française lui arracha le plus glorieux succès qui puisse illustrer un grand capitaine.

    Dès que Napoléon eût appris la rupture des ponts, il arrêta l’offensive et borna tous ses efforts à se maintenir dans ses positions. Ce fut en vain que les Autrichiens, instruits de l’événement et ralliés, nous attaquèrent incessamment depuis neuf heures du matin jusqu’à neuf heures du soir.

    Trois fois attaqués, les villages d’Essling et de Gross-Aspern restèrent toujours en notre pouvoir, encombrés de cadavres autrichiens. Enfin, vers neuf heures du soir, le feu de l’ennemi cessa ; le nôtre était déjà éteint, et nous ne combattions presque plus qu’à l’arme blanche.

    L’armée resta dans sa position pendant la nuit, et le 23 au matin, Napoléon, ayant reconnu l’impossibilité de rétablir promptement les ponts, la fit passer de la rive gauche dans l’île de Lobau, où aussitôt on travailla à des retranchements pour se garantir des tentatives de l’ennemi, qui ne s’était que faiblement opposé au passage dans l’île.

    On peut se demander, maintenant, comment il se fit qu’un général exercé, habile même, qui avait si heureusement employé un adroit stratagème pour placer son ennemi entre une armée deux fois plus nombreuse et un fleuve de quatre cents toises de large, ne profita pas de ce premier succès pour l’écraser ; chose d’autant plus facile que cet ennemi ne pouvait être secouru, et manquait de munitions pour se défendre.

    Si à Essling le prince Charles n’eût point commis une faute aussi capitale, l’empire d’Autriche était sauvé, et l’empire français pouvait finir là ; car telle était son instabilité, qu’à chaque nouvelle bataille, son existence était remise en question.

    La faute fut commise, et l’Autriche s’humilia de nouveau ; exemple attristant de l’influence que peuvent avoir, sur la destinée des peuples, les fautes d’un seul homme.

    La perte des Autrichiens fut considérable ; ils eurent de 8 à 9 000 hommes tués ou blessés. Nous leur prîmes quelques pièces de canon, quatre drapeaux, un officier-général, et 1 000 à 1 100 prisonniers.

    Notre perte ne fut pas moindre en tués et blessés. Le général de division comte de Saint-Hilaire eut la jambe cassée et mourut peu de temps après des suites de sa blessure.

    Mais la perte la plus considérable, la plus douloureuse pour l’armée française, fut celle du maréchal Lannes, duc de Montebello, qui, le 22 au soir, vers les six heures, eut une cuisse emportée par un boulet. Napoléon apprenant cette nouvelle, s’écria : « Il fallait que, dans cette journée, mon cœur fût frappé par un coup aussi sensible pour que je pusse m’abandonner à d’autres soins qu’à ceux de mon armée ». Le duc de Montebello, revenant de son évanouissement, lui dit : « Dans une heure, vous aurez perdu celui qui meurt avec la gloire et la conviction d’avoir été et d’être votre meilleur ami ». On lui fit l’amputation, et, transporté à Vienne, il y mourut le 31 mai suivant.

    La ville de Lectoure, dans le département du Gers, se glorifie d’avoir vu naître le maréchal Lannes ; il partit comme volontaire dans le département du Gers, lorsque les insolentes proclamations du duc de Brunswick appelèrent aux armes la jeunesse française.

    Nommé sergent-major, il devint bientôt officier, et s’étant souvent distingué à l’armée des Pyrénées orientales, il parvint rapidement au grade de chef de brigade. Réformé par un gouvernement qui punissait ses meilleurs défenseurs, il resta quelque temps sans emploi.

    Lorsque Bonaparte prit le commandement de l’armée d’Italie, Lannes fut se présenter à cette armée comme simple volontaire. Son mérite ne pouvait être méconnu : le nouveau général en chef l’employa comme adjudant-général. Nous l’avons vu aux batailles de Montenotte, de Millesimo, au combat de Dégo, justifier par sa bravoure le choix de Bonaparte, dont il devait devenir un des plus habiles lieutenants. Il passa le Pô le premier de l’armée, se distingua au combat de Fombio, et à Lodi, il fut du nombre des intrépides généraux qui s’élancèrent sur le pont à la tête des troupes.

    Nommé général de brigade après la prise de Pavie, qui s’était révoltée et qu’il soumit le premier, il suivit l’armée au siège de Mantoue ; là, avec six cents grenadiers, il enlève à la baïonnette le faubourg Saint-Georges, défendu par de nombreux ennemis.

    Quoique blessé au combat de Governo, il ne quitta point l’armée ; blessé de nouveau, mais plus sérieusement, devant Arcole, il était souffrant, étendu sur un lit, lorsqu’il apprend que le combat est terrible, et qu’on ne peut forcer le passage du pont ; il sort de son lit malgré ses douloureuses blessures, il se précipite au milieu de la mitraille.

    Atteint d’une nouvelle blessure à la tête, il tombe sans connaissance. Rétabli, il marche avec le général Victor contre les troupes que la cour de Rome a levées contre nous ; à la tête de sa brigade, il enlève les retranchements ennemis près d’Imola, et s’empare de la ville.

    Il accompagna Bonaparte en Egypte, y fut nommé général de division ; fit partie de l’expédition de Syrie ; se distingua dans plusieurs combats ; contribua principalement au succès de la bataille d’Aboukir. Blessé à la jambe à l’attaque du fort de ce nom, il revint en France ; et lorsqu’au 18 brumaire, le gouvernement changea, Lannes se montra un des plus zélés amis de Bonaparte.

    Dans la mémorable campagne de Marengo, le général Lannes commandait l’avant-garde : il franchit le premier de l’armée le Saint-Bernard, devenu à jamais célèbre par ce passage. Le premier il attaqua les Autrichiens. Aoste, Châtillon tombent devant lui. Il escalade la citadelle d’Ivrée. Arrivé sur les bords de la Chiusella, le corps qu’il commande emporte le passage de vive force, traversant la rivière sur le pont et à la nage. Il pénètre dans Pavie, en chasse les Autrichiens, et s’empare de leur artillerie.

    La bataille de Casteggio et de Montebello ajoutèrent à la réputation de bravoure du général Lannes, celle de général habile. C’est en mémoire de cette journée glorieuse que le nom de Montebello devint inséparable de celui de Lannes.

    Sa conduite, à la bataille de Marengo, lui valut des éloges publics de la part du général en chef. Ce fut à cette occasion qu’il eut un sabre d’honneur. Cette récompense, qui enfantait de si brillants exploits parmi nos guerriers, allait bientôt être remplacée par une décoration nouvelle, qui devait donner des charmes à la mort même. Au retour de cette campagne, le général Lannes fut nommé à l’ambassade de Portugal.

    Créé maréchal d’Empire, il commanda dans les campagnes d’Austerlitz, de Iéna et de Friedland, et soutint dignement sa grande réputation. Ce fut pendant la pénible campagne de 1807, qu’avec une franchise dont il ne se départit jamais devant celui qui la souffrait impatiemment, il répondit à Napoléon, qui le questionnait sur la Pologne : « Je pense que ce pays ne vaut pas le sang du dernier caporal de l’armée ».

    Il commanda aussi en Espagne. Saragosse en ruines fut témoin de sa bouillante audace. La guerre d’Autriche, en 1809, fut sa dernière campagne. Il mourut comme il avait vécu, environné de gloire.

     

     

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