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  • 23 février 2014 - Par Au fil des mots et de l'histoire

     

     

    La bataille de Paardeberg

    D’après « Revue du Cercle militaire » – 11 août 1900

     

    Le 12 février, lendemain du jour où la division French avait commencé son raid sur Kimberley, les différentes unités composant le gros de l’armée de lord Roberts, dont la plupart avaient été transportées par voie ferrée, de la Modder River à Honeynest Kloof, Graspan, Enslin, Belmont et autres points situés le long du chemin de fer au Sud de Modder River Station, se mettaient à leur tour en mouvement pour se diriger sur Ramdam, point de concentration désigné de toutes les troupes.

    En réalité, le territoire de l’État Libre d’Orange avait été déjà envahi quelques jours plus tôt, le 9 février, par la brigade d’infanterie montée du colonel Hannay qui, partie du Zoutpan’s Drift, à l’Est d’Orange River Station, avait pour mission de se rendre à Ramdam dans le but de couvrir la ligne ferrée contre les attaques éventuelles des Boers, et, en même temps, de protéger la marche du convoi sur cette localité.

    A Wolveskraal, situé un peu au Sud de Ramdam, cette brigade avait eu à soutenir un petit combat avec un commando orangiste aux ordres de Jacob.

    A son arrivée à Ramdam, la brigade Hannay y attendit l’arrivée des têtes de colonne de l’armée.

    Nous ne reviendrons pas sur le plan de lord Roberts. Pour masquer ses opérations, ce général laissa la division Methuen devant Cronje, qui était toujours en position au Sud de Kimberley, à Spytfontein-Magersfontein.

    L’ensemble des forces qui envahirent l’État Libre, du 9 au 12 février, comprenait : 3 divisions d’infanterie, 1 division de cavalerie et 2 brigades d’infanterie montée avec leur artillerie et les convois. L’effectif de cette armée se montait à 34 000 hommes, dont 11 000 montés, avec 98 canons de tous calibres, et un convoi de plus de 700 voitures traînées par environ 9 000 mulets et bœufs. Cet effectif fut porté, quelques jours après, à environ 37 000 hommes, par l’arrivée au Klip Drift de la brigade de la garde. L’artillerie, de son côté, fut renforcée, un peu plus tard par une batterie d’obusiers de 6 pouces.

    Toutes ces troupes partant de Graspan, Enslin et Honeynest Kloof le 12 février, firent une marche convergente sur Ramdam, où elles arrivèrent le même jour.

    La 6e division (Kelly-Kenny); avec laquelle marchait lord Kitchener, partit de Ramdam le 13 février de bon matin, se dirigeant vers le Waterval Drift, sur la Riet, continua sa marche le lendemain 14 sur Wegdraai, et de là se porta vers le Klip Drift, sur la Modder, qu’elle atteignit le 15 au matin.

    La 9e division (Colvile) et l’infanterie montée suivirent le même itinéraire. Quant à la 7e division (Tucker), avec laquelle se trouvait lord Roberts, elle traversa la Riet au Dekiel’s Drift et se porta sur Jacobsdal, d’où elle chassa, après un combat assez vif, un faible détachement boer qui s’enfuit dans la direction, de Petrusberg.

    Le 15 février, le gros de l’armée de lord Roberts était concentré sur la rive Sud de la Modder, du Rondeval Drift au Klip Drift, avec des détachements à Jacobsdal et à Wegdraai.

    L’infanterie avait fait preuve, pendant ces quatre jours de marche, de beaucoup d’endurance ; la chaleur était accablante, et parfois les troupes durent parcourir plus de 20 kilomètres sans eau.

    Le succès de cette marche aurait été complet sans la perte, le 15 février, au Waterval Drift, d’un convoi comprenant 180 voitures chargées de fourrage et de vivres, et 4000 têtes de bétail, perte dont les effets se firent vivement sentir par la suite.

    Ce convoi, qui marchait sans escorte de Ramdam au Waterval Drift, avait formé le parc le 14 février au Sud de ce gué, et commençait à traverser la Riet au prix de grandes difficultés, le 15 au matin, quand’ il fut attaqué par un parti d’environ 300 Boers qui prit position sur une série de kopjes commandant le Waterval Drift et commença à tirer sur les bœufs. Le gué était gardé par une compagnie de Gordon Highlanders et environ 150 fantassins montés, sous les ordres du colonel Ridley. Cet officier supérieur essaya sans succès de déloger les Boers ; il fut renforcé, vers midi, par le Kitchtner’s Horse avec une batterie montée et, le soir, par le général Tucker amenant avec lui la 14e brigade. Ces troupes de renfort étaient toutes accourues de Wegdraai.

    Mais les Boers qui, eux aussi, avaient été renforcés, disposaient maintenant de plus de 1000 hommes. Le général Tucker, pensant que la réussite du plan de 1ord Roberts exigeait toute la célérité possible, dut se résigner à sacrifier le convoi plutôt que de retarder la marche de l’armée et se replia dans la nuit sur Wegdraai. Les 180 voitures, dont d’ailleurs la plupart des attelages avaient été tués pendant la journée et les 4000 têtes de bétail restèrent aux mains des Boers.

    Dès que la 6e division (Kelly-Kenny) et l’infanterie montée, accompagnées par les 76e et 81batteries montées ainsi que par 2 pièces de marine de 12 livres furent arrivées au Klip Drift, le général French, qui les avait attendues une journée pour que son flanc gauche fût couvert du côté de Magersfontein, se porta rapidement sur Kimberley.

    Voyons maintenant ce qui se passait dans le camp boer pendant que French gagnait Kimberley et que les têtes de colonnes de l’infanterie arrivaient sur les bords de la Modder.

    Le comte Adalbert Sternberg, lieutenant dans la landwehr autrichienne, qui combattait dans les rangs de l’armée de Cronje, a donné à ce sujet au correspondant de la Neue Freie Presse quelques renseignements intéressants. S’il faut en croire cet officier, Cronje, malgré tous les avis qui lui étaient parvenus concernant le raid de French sur Kimberley et la marche du gros de l’armée anglaise à travers l’Etat Libre d’Orange, ne se croyait nullement en danger. Il s’attendait toujours à être attaqué de front dans sa position de Magersfontein.

    Lui parlait-on du raid de French, il répondait que les Anglais voulaient tenter avec leur cavalerie une fausse attaque contre son flanc gauche pour l’obliger à dégarnir sa position de Magersfontein. Lui signalait-on la présence de troupes anglaises du côté de Koffyfontein, il répondait que ces troupes se dirigeaient probablement sur Fauresmith afin de gagner la ligne ferrée et de couper la retraite aux commandos boers de Colesberg. En vain le comte Sternberg affirmait-il aux chefs boers que des masses importantes d’infanterie traversaient la Riet et s’apprêtaient à franchir la Modder, il n’était accueilli que par des rires incrédules et des sarcasmes.

    Le 15 février seulement, Cronje qui n’avait pas réussi, ou plutôt qui n’avait pas cherché à arrêter sérieusement la marche de French sur Kimberley — puisqu’il n’y avait pas cru jusqu’au dernier moment — commença à se rendre à l’évidence.

    Il envoya l’ordre à son principal corps en position à Magersfontein d’avoir à partir immédiatement avec ses voitures et ses canons vers l’Est. Cronje, reconnaissant enfin la gravité de la situation, se décidait, pendant qu’il en était temps encore, à s’échapper assez loin vers l’Est pour qu’il pût se reformer sur une nouvelle position et arrêter la marche des Anglais sur Bloemfontein.

    Cette résolution fut prise dans un conseil de guerre tenu le 15 au soir.

    « Les fieldcornets — rapporte le comte Sternberg — conjuraient Cronje de réunir un conseil de guerre, et, bien que la plupart des meilleurs officiers boers ne pussent y assister, puisqu’ils en étaient empêchés par leurs devoirs militaires, ceux qui étaient présents décidèrent l’évacuation du camp et la retraite sur Bloemfontein par Olifantsfontein. Dans ce conseil de guerre auquel j’assistais ainsi que Villebois (il s’agit du colonel de Villebois-Mareuil) la discussion fut des plus violentes. La plupart des Orangistes présents, préoccupés de leur bétail et de leurs biens, se prononçaient catégoriquement pour la retraite.

    Dans les circonstances présentes il était impossible qu’une retraite par Olifantsfontein pût réussir. La seule opération possible qui aurait pu réussir était une attaque du Paardeberg Drift, parce qu’en cette journée du 15, le gros des forces anglaises était encore sur la rive Sud de la Modder, et la division French se trouvait à Kimberley ».

    Bref, Cronje leva le camp à 2 heures du matin, dirigeant sa retraite vers l’Est, par la rive Nord de la Modder.

    Le comte Sternberg, parti en reconnaissance, fut fait prisonnier dans la même nuit.

    On est en droit de se demander pourquoi Cronje ne chercha pas à s’échapper vers le Nord, par Boshof par exemple, pour se rabattre ensuite à l’Est. Mais, malgré lui, Bloemfontein l’attirait, il voulait couvrir la capitale de l’État Libre, et courait ainsi à sa perte. En un mot, il choisissait un objectif politique, au lieu de lui préférer un objectif stratégique lui permettant d’échapper à lord Roberts et de rallier les autres forces fédérales.

    Aussitôt que lord Roberts apprit, le 16 février au matin, que Cronje avait évacué sa forte position de Magersfontein pour se replier sur Bloemfontein, il changea immédiatement son plan primitif. Au lieu de continuer sa marche vers le Nord-Ouest, toute l’armée anglaise allait faire un grand changement de direction à droite et se diriger vers l’Est ; son seul but était maintenant de poursuivre Cronje, et de le capturer si possible avec toutes ses forces.

    Il est évident qu’il est relativement facile de modifier en quelques heures les ordres concernant les mouvements des différentes unités d’un corps d’armée de 40 000 hommes en marche, mais il est moins facile de prendre de nouvelles mesures pour assurer leur alimentation, surtout quand il s’agit de s’éloigner de la voie ferrée, au lieu de s’en rapprocher, de traverser un pays sans ressources et de vivre sur le convoi pendant un temps beaucoup plus long qu’on ne l’avait prévu.

    Le premier soin de lord Roberts fut donc d’envoyer chercher le chef du service des approvisionnements.

    Il lui demanda — rapportent plusieurs correspondants de la presse — s’il pouvait lui promettre d’assurer aux troupes la ration complète pendant le nouveau mouvement. « Je ne le crois pas, monsieur », répondit-il. — « Trois quarts de ration ? » — « Non, monsieur » — « Demi-ration ? » — « Je ne puis vous le promettre ». Après un moment de silence, le feld-maréchal demanda avec inquiétude : « Quart de ration ? » — « Oui » — Nouveau silence, et le commandant en chef termina l’entretien en disant : « C’est bien ; je pense que vous le ferez pour moi ».

    Au lever du jour, lord Kitchener, apercevant du Klip Drift un énorme nuage de poussière tourbillonnant vers l’Est, avait deviné immédiatement ce qui se passait ; il donna l’ordre à l’infanterie montée de ne pas suivre la division French et d’aller attaquer le convoi de Cronje. Cette infanterie montée se lança dans la plaine, sur la rive droite de la Modder, pour essayer de gagner de vitesse le convoi boer par le Nord, tandis que la brigade Knox, de la 6e division (Kelly-Kenny), manœuvrant aussi sur la rive droite, chercherait à l’attaquer par le Sud.

    Cronje continua à faire filer ses voitures sur Drieput, où elles formèrent le parc vers 11 heures. Pendant toute la journée, l’arrière-garde de Cronje lutta avec les troupes anglaises pour couvrir la retraite. L’habileté avec laquelle le général boer dirigea sa retraite a été reconnue, par tous les officiers anglais. Comme l’extrême droite des Boers était repoussée par l’infanterie montée, elle galopa en arrière de leur centre pour aller prendre position sur leur gauche et faire face à la brigade Knox et à la 81e batterie montée qui s’avançaient le long de la rive Nord de la Modder.

    A midi, les Boers essayèrent de se maintenir sur trois kopjes situés à 3 kilomètres au Nord-Est du Klip Drift, mais ils furent rejetés sur une position plus forte, à Drieput.

    Malgré les efforts de la brigade Knox et de la 81e batterie, il fut impossible de déloger les Boers de leur nouvelle position avant la nuit. Toutefois, l’infanterie montée, occupant les berges de la rivière, fit une tentative audacieuse, sous un feu très vif, pour empêcher les Boers de regagner leur convoi en retraite. Les Anglais eurent, en cette journée, une centaine de tués et blessés ; le colonel Mac Donald, commandant l’artillerie, était au nombre de ces derniers.

    Pendant la nuit qui suivit le combat de Drieput, la brigade Stephenson, de la 6e division, sauf le 2e bataillon du Warwickshire Regiment, qui était resté à Jacobsdal, repassa sur la rive Sud de la Modder, au Klip Drift.

    Le 17 février, à 3 heures du matin, cette brigade marcha en droite ligne vers l’Est dans le but d’essayer de devancer Cronje soit au Paardeberg Drift, soit au gué de Koodoesrand. Vers 10 heures, la brigade Stephenson fut ralliée, au Klipkraal Drift, par la brigade Knox, qui avait suivi la rive Nord. L’infanterie montée atteignit le Paardeberg Drift le même soir, et campa sur un mouvement de terrain près de la rive Sud. A 6 heures du soir, deux brigades de la division Kelly-Kenny (Stephenson et Knox) quittèrent le Klipkraal Drift et firent une marche de nuit pour gagner aussi le Paardeberg Drift ; mais, se trompant de route, ces deux brigades dépassèrent un peu le gué et bivouaquèrent sur un léger mouvement de terrain s’élevant à 3 kilomètres plus loin.

    Grâce à cette erreur de la division Kelly-Kenny, l’infanterie anglaise se trouva placée presque en face de l’endroit où Cronje avait projeté de traverser la Modder.

    De son côté, Cronje avait quitté Drieput pendant la nuit qui suivit le combat du 16, abandonnant 78 voitures, et avait suivi la rive Nord de la Modder toute la journée du 17 pour gagner le Koodoesrand Drift. Un peu après avoir dépassé le Paardeberg Drift, il apprit que French, déjà revenu de Kimberley, occupait une ligne de kopjes élevés partant, du Koodoesrand Drift, vers le Nord-Ouest, et commandant complètement ce gué. Le général French avait, en effet, quitté Kimberley le 17, à 3 heures du matin, avec l’ordre de gagner de vitesse l’armée de Cronje, par la rive Nord de la Modder, et de lui couper la retraite.

    Cronje fit former le parc à ses voitures et campa sur la rive Nord de la Modder, à Wolveskraal, ferme située en face d’un gué du même nom, à peu près à 6 kilomètres des gués de Paar- deberg et de Koodoesrand. C’était là que le général boer avait l’intention de traverser la rivière le 18 février au matin.

    Mais, pendant la nuit, il apprit que l’infanterie montée anglaise se trouvait au Sud du Paardeberg Drift et se rendit compte qu’il serait obligé de combattre pour permettre à son convoi de se replier. Il ignorait probablement que la division Kelly-Kenny occupait un mouvement de terrain s’élevant à moins de 3 kilomètres au Sud du Wolveskraal Drift ; il ignorait également que la division Colvile n’était qu’à quelques kilomètres derrière et allait arriver au Paardeberg Drift avant le lever du jour.

    Il est probable que si Cronje avait su tout cela, il n’aurait pas hésité à sacrifier son convoi et toute son artillerie pour pouvoir s’échapper avec sa petite armée du cercle qui allait l’étreindre.

    Quoi qu’il en soit, Cronje envoya une grande partie de ses forces garnir les berges de la rivière jusqu’au Paardeberg Drift, pour se mettre à l’abri de toute attaque et pouvoir à son gré franchir la Modder au Wolveskraal Drift.

    Avant de faire le récit de la bataille du 18 février, il nous est indispensable de consacrer quelques lignes à la description du terrain situé entre les gués de Paardeberg et de Koodoesrand.

    La Modder, sur ce point, comme sur presque tout son parcours, coule au fond d’une tranchée ayant une profondeur d’environ 10 mètres et une largeur variant de 27 à 90 mètres ; ses bords et ses berges sont couverts d’épais mimosas et de saules. Sur les deux rives, mais particulièrement sur celle du Sud, le terrain est coupé de nombreux dongas perpendiculaires à la rivière, qui offrent des abris excellents contre tout ennemi s’avançant soit à travers la plaine découverte, soit le long de la Modder. Le cours général de la rivière depuis le Koodoesrand Drift est orienté Ouest-Sud-Ouest, et décrit de légères courbes vers le Sud, à environ 3 kilomètres de chaque côté du Wolveskraal Drift.

    Sur la rive Sud, une plaine unie et couverte d’herbes, dont la plus grande largeur est d’environ 2800 mètres, s’abaisse en pente douce vers la rivière : elle est limitée par de légères hauteurs se relevant et constituant, à 2000 mètres au Sud-Sud-Est de Wolveskraal, un cercle de kopjes en forme de cratère, appelé maintenant Kitchener’s Hill, un peu au Nord-Ouest d’Osfontein.

    Au Sud du Koodoesrand Drift s’élèvent trois ou quatre kopjes à l’Est et à l’Ouest, à moins de 1300 mètres de la rivière. Du Koodoesrand Drift part, vers le Nord-Ouest, une ligne de kopjes élevés, au pied desquels passe la route de Kimberley qui traverse Kameelfontein Farm.

    Sur la rive Nord de la rivière s’étend une plaine semblable à celle de la rive Sud, mais peut-être encore plus en pente et couverte de bosses méritant presque 1e nom de kopjes. La plaine est limitée, à 3 ou 4 kilomètres de la rivière par quelques kopjes, tandis qu’immédiatement au Nord du Paardeberg Drift s’élève une forte colline à sommet plat d’une hauteur d’environ 90 mètres, qui donne son nom au drift.

    Le 18 février, au lever du jour, les Boers, occupant les bords de la rivière, ouvrirent un feu violent de mousqueterie sur l’infanterie montée alors en train de déjeuner. Mais celle-ci parvint, après un combat très vif par le feu, à repousser les Boers jusqu’à 400 mètres au-dessus du Paardeberg Drift Au bruit de la fusillade, la 6e division avait pris les armes et s’était d’abord portée sur le Paardeberg Drift, jusqu’au moment où lord Kitchener, reconnaissant que la position principale des Boers se trouvait, non de ce côté, mais à Wolvelskraal la fit changer de direction pour marcher sur ce dernier point, la brigade Stephenson à droite et la brigade Knox à gauche.

    Le.colonel Stephenson, à la tête des Welshs et des Essex, traversa la plaine, au delà du camp de Cronje, puis se déploya en face de la rivière, près du coude situé au-dessous du Koodoesrand Drift, laissant les Yorks sur la droite de la brigade Knox, qui s’était déployée au milieu de la plaine.

    De son côté, la brigade des Highlanders, venant du Klipkraal Drift, se déploya à gauche de la brigade Knox, les Argylls à droite, les Black Watchs au centre et les Seaforths à gauche. Le quatrième bataillon de cette brigade, la Highland Light Infantry, était resté au Klip Drift pour assurer la ligne de communication.

    Les trois brigades avancèrent rapidement à travers la plaine absolument découverte. Pendant la marche en avant de l’infanterie, les 76e et 81e batteries montées, un canon de marine et la 60e batterie d’obusiers, qui venait d’arriver avec la 9e division, prirent position sur un petit mouvement de terrain à 1800 mètres au Sud-Sud-Est du laager et à 1400 mètres du point le plus rapproché de la rivière.

    Le canon de marine, par suite d’un accident dans son mécanisme, ne put tirer ; mais les autres pièces canonnèrent avec efficacité le laager, mettant le feu à plusieurs voitures, et faisant sauter trois caissons de munitions.

    Le laager devint intenable, les Boers se servirent très peu de leurs canons, à l’exception des Vickers Maxim dont ils firent grand usage dans l’après-midi.

    Vers 9 heures, la brigade Smith-Dorrien, excepté l bataillon de la Cornwall Light Infantry laissé en réserve, traversa la Modder au Paardeberg Drift  et remonta la rive Nord de cette rivière, à travers les broussailles, pendant près de 1600 mètres. Se trouvant dans l’impossibilité de continuer sa marche dans la même direction, cette brigade s’écarta de la Modder pour se porter franchement vers le Nord-Est et se déploya ensuite face à l’Est, les Shropshires à droite, les Canadiens au centre et les Gordons à gauche.

    Les Shropshires et les Canadiens s’avancèrent par une série de petits bonds avec beaucoup de vaillance ; les Canadiens, en particulier, déployèrent en cette circonstance la plus grande bravoure.

    Ces deux bataillons, soutenus par la 82e batterie que leur avait envoyée le général Colvile, parvinrent à prendre d’enfilade les Boers bordant les rivières et leur causèrent des pertes très élevées.

    A 11 heures, l’artillerie à cheval de French se mit en batterie sur les hauteurs au nord du laager, qu’elle canonna ainsi que le lit de la rivière. Quelques obus tombèrent même trop loin et éclatèrent dans les lignes de la brigade des Highlanders. A mesure que la matinée s’écoulait les troupes anglaises continuaient à s’avancer bravement à travers le terrain découvert, malgré un feu violent, et en dépit des fatigues occasionnées par les derniers jours de marche.

    Vers midi, l’infanterie montée, qui avait occupé un kopje au sud du Koodoesrand Drift, traversa la Modder et s’avança pendant quelque temps le long de la rive Nord sous un feu très violent.

    C’est là, dit un correspondant du Times, que fut probablement tué le colonel Hannay ; Un peu après une heure de l’après midi, les Welshs et les Essex (brigade Stephenson) traversèrent la Modder un peu en aval du point où avait passé l’infanterie montée, et s’avancèrent face à l’Ouest à travers les broussailles de la rive Nord.

    Ces deux bataillons eurent une brillante conduite et subirent de lourdes pertes. Vers la fin de la journée, un détachement des Welshs, cherchant à enlever d’assaut une position, perdit 24 hommes sur 25. Vers une heure également, la 13e brigade (Knox) et la brigade des Highlanders, renforcées par la moitié des Cornwalls, firent un effort vigoureux pour gagner les bords de la rivière ; les généraux de ces deux brigades, Knox et Mac Donald, furent blessés.

    Vers deux heures, la brigade Knox et les Yorks atteignirent les berges de la Modder juste au dessus du coude, tandis que 3 compagnies des Seaforths et 3 des Black Watchs traversaient cette rivière un peu en aval.

    Le coude même était si fortement occupé, que le reste de la brigade des Highlanders ne put en approcher à plus de 380 mètres. Bien que les troupes anglaises occupassent la berge en amont et en aval de ce coude, les Boers s’y maintinrent jusqu’à la tombée de la nuit, puis rentrèrent dans leur laager.

    A 3 heures, les Canadiens et les Shropshires se trouvant dans l’impossibilité d’avancer plus loin, le général Colville leur envoya, à 3 heures l/2, 3 compagnies et demie des Cornwalls pour les soutenir.

    Traversant la ligne de combat des Canadiens et des Shropshires, les Cornwalls entraînèrent avec eux un certain nombre d’hommes de ces deux bataillons, s’avancèrent jusqu’à 700 mètres de la position boer, et exécutèrent une charge à la baïonnette qui peut être considérée comme une des actions les plus éclatantes de cette journée.

    Néanmoins, malgré toute leur bravoure, les Cornwalls, dont le chef, le lieutenant-colonel Aldworth, tomba frappé à mort, ne purent pousser leur charge à fond et durent s’arrêter à 350 mètres des Boers.

    Kitchener’s Hill, au nord-ouest d’Osfontein, fut le théâtre de quelques opérations décousues et inutiles. Dans la matinée, Kelly-Kenny avait placé sur cette colline 3 compagnies des Gloucesters qui, plus tard, reçurent l’ordre d’aller renforcer la ligne de combat et furent remplacés, sur leur position par un petit détachement du Kitchener’s Horse. La plupart des cavaliers de ce détachement étaient, en train de faire boire leurs chevaux et de préparer leur repas quand, vers 4 heures, ils furent surpris par quelques Boers venant du Sud. 30 hommes et 4 officiers, sur un total de 45, furent faits prisonniers.

    A la tombée de la nuit, les Anglais occupaient les deux rives de la Modder, sauf une zone d’environ 1600 mètres de chaque côté du laager dans lequel toutes les forces de Cronje étaient investies.

    « Dès le début — dit un correspondant du Times — la bataille du 18 février s’affirma comme une affaire dans laquelle l’initiative des soldats et des officiers de troupe devait jouer le principal rôle. La façon dont les troupes combattirent leur fait le plus grand honneur. Epuisés par une semaine de marches et de combats, sans vivres et sans boisson, pour la plupart depuis la veille après-midi, les soldats firent preuve d’une endurance et d’un courage qu’il serait difficile de surpasser. Ce furent peut-être les Welshs, les Cornwalls et les Canadians qui déployèrent la plus grande bravoure ; mais tous les régiments firent admirablement leur devoir.

    Le chiffre des pertes — plus de 1 100 tués et blessés — réparties à peu près également entre toutes les unités, prouve que chaque bataillon des 2 divisions engagées se conduisit vaillamment. Une des causes de ce gros chiffre de pertes est la soif irrésistible des hommes qui, lorsqu’ils s’approchaient de la rivière, ne pouvaient s’empêcher de s’y précipiter, sans souci du feu de l’ennemi, pour boire un peu ».

    Après avoir constaté que la prise d’assaut de la position boer — qui n’était en réalité qu’une énorme tranchée abritée, coupée de nombreuses tranchées plus petites, avec de l’eau coulant en abondance au milieu — eût coûté des pertes très élevées, le correspondant du Times ajoute :

    « On est en droit de se demander si la bataille du 18 février était réellement nécessaire, et s’il n’aurait pas été aussi facile d’arriver à notre but d’une part en occupant toutes les hauteurs sur lesquelles nous fûmes plus tard établis, de manière à cerner les Boers, et d’autre part en avançant ensuite progressivement des gués de Paardeberg et de Koodoesrand.

    Tout porte à croire maintenant que cette tactique eût été préférable ; mais le 18 février on pensait qu’il était nécessaire d’infliger un échec sérieux à Cronje si l’on voulait l’empêcher de s’échapper. Il est indubitable que lord Kitchener avait quelque espoir de capturer toutes les forces ennemies en cette journée et d’utiliser les vivres et le convoi de Cronje pour continuer la marche sur Bloemfontein. Si l’on avait eu le temps de préparer le plan de la bataille en reconnaissant préalablement le terrain, l’attaque n’aurait probablement pas été poussée aussi à fond au centre de la position. Mais la bataille débuta d’une façon si soudaine et si inattendue, qu’il aurait été bien difficile de faire replier les bataillons déjà engagés ».

     

     

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