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  • 9 février 2014 - Par Au fil des mots et de l'histoire

     

     Boers à Spion Kop en 1900

     

    La bataille de Spion Kop

    D’après « Étude tactique de la guerre sud-africaine, 1899-1900 » – Commandant Emmanuel François René Fonville – 1904

     

    A minuit, la colonne d’attaque se rassemble dans le vallon entre Taba Myama et Spion Kop, à l’entrée du sentier qui escalade l’angle Sud-Ouest du plateau. Elle est sous les ordres du lieutenant-colonel Thorneyeroft et sous la direction supérieure du général Woodgate.

    Elle comprend deux bataillons, deux compagnies montées, une demi-compagnie du génie. Mais elle n’a ni artillerie ni travailleurs munis d’outils ; l’absence de ces deux éléments sera la cause de son insuccès, malgré d’héroïques efforts.

    A 1 heure du matin, la colonne, en file indienne, sous une pluie battante, commence son ascension ; elle avance dans le plus profond silence ; ordre est donné de n’agir qu’à la baïonnette.

    A 3 heures, on a fait une lieue, et on atteint le sommet. Au moment où l’on met la baïonnette au canon, éclate le Qui vive ! d’une sentinelle boer. La tête de colonne se jette à plat ventre, laisse passer la décharge du petit poste et se précipite sur la tranchée qu’il gardait. A quelques centaines de mètres plus loin est une deuxième tranchée, garnie par la grand’garde.

    Elle est enlevée comme la première. Sur le plateau, les Boers n’avaient pas d’autre garnison.

    A 4 heures, les Anglais se trouvaient maîtres, presque sans coup férir, de toute la corne Sud-Ouest, sur un front de 350 mètres et une profondeur de 1000. Immédiatement ils s’occupent d’y construire un point d’appui. Mais l’insuffisance du nombre de sapeurs du génie et le défaut d’outils de pionniers les obligent à s’en tenir à une tranchée en forme de demi-cercle ; encore, une de ses faces est-elle, dans l’obscurité, orientée de telle façon qu’elle se trouvera enfilée par les défenseurs de Taba Myama.

    Le jour se lève dans une brume opaque, qui enveloppe tout et condamne à l’immobilité jusqu’à 8 heures du matin. Ce brouillard fut, pour les Boers, un coup de fortune.

    A 4 heures, le général Botha, posté au Taba Myama, apprend par les fuyards l’enlèvement de Spion Kop.

    Comprenant tout le danger, il donne immédiatement, avec une perspicacité el une promptitude admirables, les ordres nécessaires pour le reprendre : des estafettes courent au galop prescrire aux grosses pièces de Brakfontein et de Taba Myama de concentrer leurs feux sur Spion Kop ; puis 350 hommes d’élite divisés en deux colonnes, conduites l’une par Botha, l’autre par Burgher, vont se masser au sommet du col entre Taba Myama et Spion Kop (angle Nord-Ouest du plateau) ; elles sont renforcées de deux mitrailleuses Maxim.

    En même temps, des essaims de tirailleurs, en demi-cercle sur les deux flancs, se glissent silencieusement d’abri en abri, le long des bords du plateau, sur les ailes de la position anglaise.

    A la faveur du brouillard, les Boers pénètrent, sans être éventés, sur la partie septentrionale du Spion, s’y déploient en tirailleurs et s’avancent ainsi, sans bruit, jusqu’à un dos d’âne qui barre le plateau de l’Est à l’Ouest dans toute sa largeur, à 600 mètres seulement du retranchement ennemi. Ils forment une longue ligne enveloppante autour de leur adversaire, terré en tas en contre-bas dans un angle étroit et sans profondeur.

    A 8 heures du matin, la brume se dissipe. Dès qu’ils voient clair, les Boers ouvrent le feu, et leur fusillade, renforcée de la mitraille des Maxim, éclate soudaine- ment avec rage. Les grosses pièces de Brakfontein et de Taba Myama, qui n’attendaient que ce signal, tonnent en même temps. Le retranchement anglais n’est bientôt plus qu’un nid à projectiles.

    De part et d’autre, on appelle des renforts.

    Chez les Anglais, le général Woedgate est frappé à mort. Le colonel Crofton, qui prend le commandement à sa place, envoie au général Warren, par héliographe, une dépêche disant : « Tout est perdu si n’expédiez pas promptement renforts ».

    Pour réponse, le général Warren ordonne au général Coke de partir avec deux bataillons ; il prendra la place du général Woodgate et devra, avec les 3000 hommes entassés à la redoute, tenir jusqu’à la dernière extrémité.

    A peine est-il parti, le général Warren reçoit du général Buller, resté à Spearman-Farm, un télégramme confirmant les mauvaises nouvelles du plateau et prescrivant d’y confier la direction des affaires au lieutenant-colonel Thorneycroft, dont l’énergie est réputée. Le général Warren transmet l’ordre, mais il omet d’en aviser le général Coke ; de sorte que le commandement, passé de Woodgate à Crofton, de Crofton à Coke et à Thorneycroft, se trouvera jusqu’au soir partagé entre ces deux derniers, à l’insu de l’un et de l’autre.

    En réalité, c’est Thorneycroft qui sera l’âme de la résistance. Sur sa demande, les batteries anglaises postées à l’entrée du vallon entre Spion Kop et Taba Myama concentrent leur tir sur la corne Nord, par où arrivent les renforts boers; celles de Three Tree Hill entament le duel avec les pièces du Taba Myama, dont elles détournent ainsi le feu.

    Grâce à cette diversion, une sorte de détente se produit vers 11 heures dans l’attaque des Boers.

    Elle permet l’arrivée des deux bataillons de renfort de Coke, puis, quelque temps après, celle de deux autres bataillons envoyés par la brigade Lyttleton ; ceux-ci, pour venir, ont dû repasser la Tugela au Potgeiters-Drift, longer sa rive Sud, la refranchir à un gué intermédiaire entre ceux de Potgeisters et de Tritchards, puis s’engager dans le sentier de Spion Kop.

    Vers 5 heures du soir, il y a ainsi six bataillons anglais en tas sur l’étroite position. Ils n’ont avec eux aucune pièce de canon. Tout autour, la ligne des Boers se resserre et s’épaissit, vomissant les balles. Aux effets déprimants du feu, s’ajoutent les tortures de la soif et de la faim ; sur le plateau, pas une goutte d’eau ; dans les sacs, pas une ration.

    Le général Warren, demeuré dans la vallée, se bornait à demander télégraphiquement des nouvelles. Enfin, vers 7h30 du soir, il s’avisa qu’un soutien d’artillerie serait utile et qu’il fallait organiser des retranchements. Il ordonna de faire monter au Spion deux pièces de marine, celles de montagne et deux détachements, chacun de 600 hommes, de travailleurs porteurs d’outils. Puis, pour se mieux renseigner, il appela le général Coke.

    Mais ces secours commençaient à peine à gravir le sentier, quand ils furent croisés par les premières troupes de la défense, qui abandonnaient le plateau.

    Après le départ du général Coke, le colonel Thorneycroft, resté seul directeur du combat, avait estimé que ses troupes épuisées par la journée de lutte, quelques-unes à jeun depuis dix-huit heures, n’ayant plus ni vivres ni munitions, étaient hors d’état de garder la position sous la menace d’un coup de main dans la nuit, et il avait pris sur lui de profiter de la tombée du jour pour exécuter la retraite.

    Cette initiative lui fut durement reprochée. Reproche injuste. Présent au combat, au milieu des troupes dont il partageait les angoisses et qu’il ne maintenait sur place depuis le matin que par des prodiges d’énergie, il était mieux à même que quiconque de juger sainement la situation.

    La responsabilité de l’échec ne saurait en aucune façon lui revenir. Elle remonte plus haut, au général Warren d’abord, puis au général Buller lui-même.

    Que penser du premier, qui, inspirateur de l’entreprise, s’est tenu tout le jour à l’écart, dans le fond de la vallée ; qui n’a pas eu l’idée, maître de Spion Kop à 4 heures du matin, de consolider sa conquête entre 4 et 8 heures ; qui s’est borné à communiquer avec les défenseurs par télégraphe, sans songer à organiser des postes de correspondance, à se faire renseigner par des officiers, à aller voir lui-même ce qui se passait au point où se livrait une bataille décisive ; qui, de 8 heures du matin à 7h30 du soir, n’a donné d’autres ordres que d’envoyer successivement quatre bataillons de renfort, sans souci d’organiser la position, de la renforcer d’artillerie ; qui a oublié de pourvoir aux ravitaillements en eau, en vivres, en munitions ?

    Que penser du général Buller, spectateur éloigné et impassible de l’action, dont il se contente d’observer du haut d’un ballon les péripéties, qui n’intervient qu’une seule fois, pour porter le trouble dans l’organisation du commandement ?

    Les pertes pour la journée s’élevaient, du côté anglais, à 1150 officiers et soldats hors de combat ; chez les Boers, il y avait en tout 200 hommes atteints.

    Spion Kop abandonné, le plan Warren, consistant à forcer le chemin du Taba Myama, devenait inexécutable.

    Le général Buller, reprenant le 25 la direction des opérations, décida que les troupes repasseraient sur la rive Sud de la Tugela et iraient goûter au camp de Spearman un repos bien nécessaire après sept jours de combat. Il fallut deux journées pour faire traverser la rivière à l’énorme attirail du corps de manœuvre.

    Cette retraite se fit sans incidents, sous la protection de l’artillerie lourde. Les Boers ne l’inquiétèrent pas. Leur naturelle aversion pour l’offensive suffirait peut-être à expliquer leur inaction. Mais il est juste d’observer aussi que leur faible effectif (6 à 7000 hommes), qui avait pu dans la défensive tenir tête pendant sept jours à un effectif triple, était trop inférieur et trop fatigué pour rien entreprendre contre les 20 000 soldats du général Warren.

    Le 27 au matin, le corps de manœuvre était reconcentré au camp de Spearman, à l’exception de la brigade Lyttleton, laissée en tête de pont au Krantz Kloof. C’était l’indice qu’on n’avait pas renoncé définitivement au passage de la haute Tugela.

     

     

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