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  • 9 juillet 2013 - Par Au fil des mots et de l'histoire

     

     Le 8 juillet 1915 – Le combat de la Fontenelle dans EPHEMERIDE MILITAIRE le-combat-de-la-fontenelle-150x150

     

    Le combat de la Fontenelle

    D’après « La Grande guerre du XXe siècle » – 1916

     

    De larges ondulations, coupées de quelques ravins, des prairies, des champs de pommes de terre, des bois de sapins. Çà et là, des hameaux, dont chaque maison est entourée d’un verger, tel est l’aspect du pays vosgien qui s’étend entre les hauteurs boisées de Senones et le grand massif forestier de la montagne d’Ormont.

    C’est dans cette région que s’est arrêtée, en septembre dernier, la retraite allemande qui a suivi la bataille de la Marne. Depuis lors, le front s’y est stabilisé et l’activité s’est concentrée surtout autour d’un point que les Allemands appellent « la hauteur du Ban-de-Sapt », et que nous désignons sous le nom de « cote 627 » (carte d’état-major en couleurs au 1/50 000) ou de « hauteur de la Fontenelle ».

    La Fontenelle est un des hameaux qui composent le Ban-de-Sapt. Il est en notre possession, tandis que, plus à l’Est, les autres localités du Ban, Laître et Launois, sont occupées par les Allemands. Entre la Fontenelle et Launois, s’élève la colline 627 qui domine toute la région.

    Ce belvédère était jadis un but de promenade. Aujourd’hui, c’est un bastion et un observatoire ardemment disputé et sur lequel les projectiles d’artillerie n’ont rien laissé subsister du petit bois de sapins qui en couvrait le sommet.

    Pour nous enlever la cote 627 sur laquelle nos troupes étaient solidement installées, les Allemands entreprirent un véritable siège.

    Progressant lentement à la sape, faisant exploser de nombreux et puissants fourneaux de mine, ils arrivèrent peu à peu à se rapprocher de nos positions, sans arriver toutefois à les entamer.

    Le 22 juin, les lignes étaient en présence à quinze ou vingt mètres, parfois à moindre distance. Ce jour-là, après un violent bombardement d’artillerie, l’ennemi donna l’assaut et réussit, au prix des pertes les plus graves, à prendre pied sur le sommet et même à pousser quelques éléments jusqu’à la Fontenelle. Vigoureusement ramenés par une contre-attaque qui nous permit de faire 142 prisonniers, les Allemands restèrent néanmoins accrochés au haut de la colline.

    Ils s’y fortifièrent aussitôt avec un labeur et une ardeur auxquels le général von Knoerzer, commandant la 30e division bavaroise, rendit hommage en ces termes :

    « En visitant aujourd’hui la position nouvellement conquise sur la hauteur du Ban-de-Sapt, j’ai eu l’occasion de me convaincre que, depuis que nous l’occupons, on a travaillé avec le plus grand zèle à l’organiser et que l’on continue à la fortifier avec joie et amour. J’ai l’assurance que la hauteur du Ban-de-Sapt sera transformée dans le plus bref délai en une forteresse imprenable et que les efforts éventuels des Français pour la reprendre échoueront avec les partes les plus sanglantes ».

    L’ordre du général von Knoerzer est daté du 3 juillet.

    Le 8 juillet, les préparatifs nécessaires étaient terminés.

    Ce jour-là, à 7 heures du soir, trois colonnes d’assaut, placées préalablement face à leurs objectifs et appuyées par le tir extraordinairement précis d’une artillerie aussi nombreuse que puissante, abordaient la position ennemie et l’enlevaient d’un magnifique élan.

    Au centre, l’attaque prenait pied d’un seul coup sur la ligne de faîte et la dépassait, tandis que notre droite, par une démonstration vigoureuse, immobilisait l’ennemi sur ses positions à l’ouest de Launois.

    Notre attaque de gauche, qui avait d’abord progressé plus lentement, réussissait, à la faveur de la nuit, à s’emparer de la partie nord-ouest de la hauteur, tandis qu’à l’extrême-gauche, d’autres éléments débordaient largement la position, encerclant et faisant prisonniers ses derniers défenseurs.

    Au lever du jour, non seulement la totalité de la hauteur était reprise, mais encore l’ensemble de l’organisation défensive allemande jusqu’à la route Launois-Moyenmoutier était tombée en notre pouvoir.

    La totalité de la garnison du point d’appui (2 bataillons de la 5e brigade d’ersatz bavarois) avait été tuée ou faite prisonnière. Grâce à la rapidité de l’exécution et à l’appui efficace de notre artillerie, nos pertes étaient légères et s’élevaient à moins du quart de celles de l’ennemi.

    Les assaillants de la Fontenelle sont montés à l’assaut avec le même courage, avec le même élan, avec la même impassibilité que leurs camarades d’Arras.

    L’attaque principale, qui prit pied au centre sur la hauteur 627, a réussi en moins de dix minutes. C’était un spectacle impressionnant que de voir nos braves lignards aborder, au milieu de la fumée des projectiles, les retranchements allemands, inspecter ceux-ci pour s’assurer que l’ouvrage était bien fait, et continuer la marche en avant, l’arme à la bretelle et la main dans la musette à grenades.

    C’est à l’artillerie de tous calibres, qui a préparé et accompagné l’attaque, qu’il faut faire remonter l’honneur d’avoir obtenu, sans pertes élevées, l’important succès que nous enregistrons.

    Avant l’attaque, les retranchements de l’ennemi avaient été entièrement bouleversés, et tel défenseurs avaient dû se terrer dans les profonds abris dont ils n’ont souvent pas eu le temps de sortir avant l’arrivée de notre infanterie.

    C’est également la puissance de notre feu d’artillerie qui a entravé toute tentative de contre-attaque et, après l’enlèvement de la position, a réussi à soulager notre infanterie, en butte au bombardement ennemi, en prenant sous un feu des plus efficaces les batteries de l’adversaire.

    Nous avons fait, au cours des combats des 8 et 9 juillet, un total de 881 prisonniers, dont 21 officiers : les uns surpris dans leurs abris par l’attaque centrale, les autres débordés et cernés par notre action de flanc. Tous étaient encore sous l’impression de la commotion nerveuse du bombardement. « On ne peut imaginer pareil enfer », disaient-ils, et la plupart ne cachaient pas leur satisfaction d’échapper, pour l’avenir, à de telles émotions, considérant qu’en les ayant subies une fois sans y laisser la vie ou la raison, ils avaient rempli tout leur devoir de soldat.

    Les officiers, presque tous à bout de nerfs, exprimèrent eux aussi leur horreur de ce bombardement. « A chaque coup, dirent-ils, nos abris étaient secoués comme une boîte ».

    Tous étaient officiers de réserve : professeurs, employés d’industrie et de banque. L’un des plus ébranlés était un candidat en théologie qui, deux jours après sa capture, croyait encore, au moindre bruit, entendre l’éclatement d’un obus. Seul, le chef de bataillon (major Michahelles, du 11e bataillon d’ersatz), qui commandait le secteur et appartenait à l’active, avait conservé son calme. Il ne cacha pas son admiration pour le « travail » de notre artillerie et de notre infanterie.

    L’organisation défensive allemande a été pratiquement annihilée. Elle était pourtant extrêmement sérieuse, puisqu’elle comprenait cinq lignes de tranchées et de boyaux, des ouvrages organisés pour le tir sur les deux faces, pour le cas où la position serait débordée, des blockhaus couverts de rondins et de tôles ondulées avec embrasures formées par des boucliers et des abris souterrains très profonds.

    Le dénombrement du matériel pris : mitrailleuses, fusils, munitions, grenades, etc., n’a pu encore être fait. Chaque jour, on déterre de nouvelles mitrailleuses. Huit ont été déjà retrouvées. Dans un petit bois, le long de la route, nous avons trouvé un parc du génie largement approvisionné d’outils, fils de fer, boucliers, sacs à terre. Nous avons pris aussi quatre lance-bombes, deux canons de 39 et un canon de 37.

    Le régiment qui a pris la part la plus active au combat de la Fontenelle s’était déjà illustré à la prise de la cote 830, dans la vallée de la Fecht. Il vient d’être cité tout entier à l’ordre de l’armée des Vosges.

    Une compagnie d’un autre régiment du même recrutement, de l’Ain, ainsi que les sapeurs du génie, qui ont accompagné les attaques avec un dévouement admirable, méritent un égal tribut d’admiration.

    Les corps rivalisèrent d’élan. Même ceux à qui était confiée la garde des tranchées voulurent avoir leur part de gloire. Quelques unités d’un régiment catalan participèrent ainsi de leur propre initiative au nettoyage de la position et, dans un blockhaus oublié par les troupes d’assaut, ils firent 90 prisonniers.

    - C’est trop beau ! s’écria un artilleur préposé au service des canons de tranchées, en voyant l’infanterie s’élancer à l’attaque et, prenant un fusil, il s’élança à l’assaut avec ses camarades.

    [Journal Officiel, 18 Juillet 1915]

     

  • 11 commentaires à “Le 8 juillet 1915 – Le combat de la Fontenelle”

    • Martial Poncet on 6 mars 2014

      Dommage de ne pas citer les régiments qui ont participé à cette bataille.

      • Pierre Magellan on 16 décembre 2014

        Il y avait le 133° régiment d’Infanterie en garnison à Belley (01).
        Sachant qu’Alphonse Grospiron, négociant et photographe à Lélex (01), a été tué lors de cette bataille le 8 juillet 1915 (donc après sept heures du soir).

      • François Devialet on 24 janvier 2015

        Mon grand-père a été fait prisonnier à la Fontenelle le 22 juin 1915, puis envoyé en captivité à Ingolstadt en Bavière.
        Il appartenait au 23° régiment d’Infanterie de Bourg en Bresse dans l’Ain.
        bien cordialement

        • Florence javelle on 11 novembre 2015

          Mon grand père comme le votre à été blessé dans cette bataille et fait prisonnier à ingolsdtadt , il appartenait au 44 régiment d infanterie. Il s’appelait Jules Alphonse guillermin
          Florence javelle

    • Hervé M on 1 juin 2015

      Mon grand-père Hippolyte du 23 è R.I. a aussi été capturé à la Fontenelle le 22 Juin 1915 et est resté prisonnier à Eichstadt en Bavière jusqu’en 1919.
      Cordialement.

    • Hervé Marguin on 17 mai 2016

      Bonjour
      J’aimerais entrer en contact avec Francois Devialet car j’ai commencé à rédiger une liste d’environ 200 soldats du 23e R.I. capturés le 22 Juin 1915 à la Fontenelle.
      Cordialement

    • Bruno de Buttet on 5 décembre 2016

      Le capitaine Louis de Buttet (1876-1915), est mortellement blessé le 22 juin 1915 à La Fontenelle, à la tête de la Compagnie du 23ème Régiment d’Infanterie de Bourg-en-Bresse. Citation à l’ordre du régiment: « A été mortellement blessé à La Fontenelle où il se portait avec sa compagnie en renfort de la Ière ligne de défense. Cet officier n’a cessé d’avoir une superbe attitude au feu. Il était adoré de ses hommes qui avaient en lui la plus grande confiance ».

      • Humbert de Buttet on 11 février 2020

        Merci Bruno !
        Je t’embrasse.

    • Sylvain on 12 janvier 2018

      Bonjour.
      Les messages datent un peu mais cela pourrait être utile à qui fait des recherches.
      Mon arrière-grand-père a été blessé le 23 juin 1915 à la Fontenelle. Amputé suite à un éclat d’obus.
      Il appartenait au 37e Régiment d’Infanterie Coloniale.

    • Meyer on 2 octobre 2018

      Mon gd père était là fontenelle – ban de sapt -St jean d’Ormont, son régiment était le 210* d’infanterie en 1915

    • Chauvel on 8 février 2020

      Bonjour,
      Mon grand-père faisait parti du 23ème RI. Il a été fait prisonnier à la Fontenelle le 22 juin 1915 et détenu à Ingolstadt jusqu’en décembre 1918.

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