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    La prise de Charleroi

    D’après « Nouveau dictionnaire historique des sièges et batailles mémorables » – 1809

     

    Depuis les affaires de Maubeuge et de Hondschoote, les différents corps de l’armée du Nord étaient disséminés dans des cantonnements, depuis Givet et la Meuse jusqu’à la mer. Le premier soin du général Pichegru fut de les réunir en grands corps autour de Guise et de Cambrai, dans les premiers jours du printemps de 1794.

    De part et d’autre, on regardait la campagne comme décisive. Les ordres absolus du comité de salut public enjoignaient à Pichegru d’attaquer les ennemis vers Charleroi, au centre de leurs positions, où ils avaient réuni la majorité de leurs forces. Mais la raison de guerre lui indiquait d’agir vers la Flandre maritime pour les obliger disséminer à toutes leurs troupes. Il était encore possible, en agissant ainsi, d’obtenir des succès marquants en contrariant leurs vues, et peut-être de tourner leurs positions par un mouvement de grande tactique.

    L’armée des Ardennes fut chargée de seconder les opérations de Pichegru, et de forcer son aile droite. En conséquence, le général Charbonnier fut obligé d’opérer sur la Sambre, vers Charleroi, position la plus difficile à emporter, tant l’ennemi y avait accumulé de forces. Pichegru préféra de se mettre à la tête de son aile gauche où ses plans lui promettaient des succès.

    Le 20 mai, Charbonnier passa donc la Sambre, s’empara de Binch, Fontaine, et investit partiellement Charleroi. Quelques jours, elle se soutint dans cette position, mais le 23, le général Kaunitz, dont les forces étaient très augmentées, attaqua les Français avec vigueur, fit treize cents prisonniers, leur enleva vingt-cinq canons, et les obligea de repasser la Sambre.

    Le général Charbonnier fit, le 25 mai et les jours suivants, de nouveaux efforts pour repasser la Sambre, mais ses tentatives furent vaines, malgré la terreur et les menaces employées par le barbare Saint-Just contre les vaincus.

    Dès le 29, l’aile droite reprit encore ses positions au delà de la Sambre, forma le blocus de Charleroi, et commença à y jeter des bombes. Les Autrichiens avaient, dans cet intervalle, fait venir des troupes fraîches de Tournai. Aussitôt leur arrivée, leurs généraux ordonnèrent une sortie de Charleroi.

    Au moyen d’une attaque simultanée, et de la supériorité de leurs forces, ils obligèrent encore une fois, les Français de repasser la Sambre et de lever le siège de Charleroi, dont une partie était en feu. Si Saint-Just et Lebas avaient eu la moindre notion de l’art militaire, ils auraient senti qu’ayant toujours passé la Sambre en nombre supérieur à l’ennemi, les Français devaient d’abord forcer les Autrichiens à recevoir le combat, et seulement alors entreprendre le siège de Charleroi, qui, demeurée sans défense, n’aurait pas manqué de se rendre. Cette conduite vraiment militaire aurait assuré des succès, et conservé la vie d’une foule de braves qui périrent dans ces tentatives toujours répétées et longtemps infructueuses.

    Au moment où l’aile gauche de l’armée du Nord investissait Ypres, et s’efforçait d’attirer les Autrichiens au combat, le général Jourdan, à la tête de trente mille hommes détachés de l’armée de Rhin et Moselle, traversait les Ardennes, s’emparait de Dinant le 5 juin, et opérait sa jonction avec la droite de l’armée du Nord et de l’armée des Ardennes qui venaient d’être forcées de lever encore une fois le siège de Charleroi.

    Toutes ces troupes réunies prirent alors le nom d’armée de Sambre et Meuse, sous les ordres du général Jourdan subordonné à Pichegru. A la tête de forces aussi respectables, Jourdan crut devoir repasser encore une fois la Sambre et recommencer le siège de Charleroi.

    Il fit occuper à son armée une position demi-circulaire, ses deux ailes à la Sambre, son centre à La Ransart.

    Dans la nuit du 14 au 15 juin, la tranchée fut ouverte, après plusieurs combats livrés sur le front de l’armée, dont les succès furent balancés. Les Français s’emparèrent d’une redoute à la gauche de la chaussée de Bruxelles. Cependant le prince d’Orange partit le 15 juin de Nivelle pour se reporter sur Charleroi, et en faire lever le siège.

    Ses avant-postes furent repoussés dans la soirée du même jour, mais il ne se décida pas moins à livrer bataille le 16 juin, et à attaquer le général Jourdan sur quatre colonnes : la première aux ordres du général Beaulieu ; la seconde à ceux du général Alvinzi ; la troisième commandée par le prince de Reuss, et la quatrième par le général Wartensleben.

    La troisième colonne marchait contre la droite de l’armée française, où se trouvait le général Marceau ; la seconde contre les divisions des généraux Championnet, Lefebvre et Morlot, qui formaient le centre, et occupaient La Ransart, Gosselies et Courcelles. La quatrième devait attaquer la gauche postée à Trazegnies, Forchies et Piéton. Les divisions des généraux Kléber et Montaigu, entre la rive gauche de la Sambre et Fontaine-l’Evêque, se joignaient par la droite avec la division du général Morlot.

    Le général Beaulieu, parti de Sombref, marcha sur Mellet, d’où il porta un corps de troupes pour gagner la plaine vers Herpignies. Le général Championnet avait envoyé lui-même dans ce village des troupes qui se portèrent dans les blés et firent, à l’approche des Autrichiens, une décharge à bout portant qui leur tua beaucoup de monde et les força de se retirer. Mais en même temps, la division du général Marceau, forcée de repasser la Sambre à Pont-le-Loup, par le prince de Reuss, avait laissé à découvert la droite de la division de Championnet. Le général Beaulieu revint à la charge avec de nombreux renforts et vingt pièces d’artillerie, attaqua de front le village de La Ransart, le tourna par sa droite, l’enleva, et obligea le général Championnet de se retirer sur le plateau du moulin de Jumet où il trouva la division Lefebvre qui avait été forcée à un mouvement rétrograde.

    Lorsque la droite des Français eut été repoussée, que leur centre se fut réuni sur le plateau de Jumet, le général Alvinzi se joignit au général Beaulieu. Ils emportèrent ensemble le village de Gosselies qui fut ensuite repris par le général Morlot, mais ce dernier ne tarda pas lui-même à être obligé de l’évacuer. Morlot, accablé par des forces infiniment supérieures, fit aussi sa retraite sur le plateau de Jumet ; elle s’y trouva protégée par les divisions de Championnet et de Lefebvre.

    Alors une terreur panique s’empare de quelques bataillons français. Ils répandent le désordre et nécessitent la retraite des trois divisions au delà de la Sambre, par Marchienne au Pont. Ainsi les Autrichiens se trouvaient vainqueurs à leur gauche et au centre. Ils n’avaient cependant pas eu le même succès à leur droite où le général Kléber avait obligé le général Wartensleben à se replier avec perte sur Haine, Saint-Paul et Nivelles, et était demeuré maître du champ de bataille. Dès l’instant où la droite et le centre eurent repassé la Sambre, il se trouve forcé à la même manœuvre dans la nuit du 16 au 17 juin.

    Les Autrichiens détruisirent tous les travaux du siège de Charleroi, et se retirèrent aussi dans la nuit sur Nivelles, par le chemin de Namur. Dès le lendemain, le général Jourdan tenta de nouveau le passage de la Sambre, et l’opéra malgré de grandes difficultés. L’armée française reprit ses positions sur la rive gauche de la Sambre, et recommença le siège aux ordres du général Hatri.

    Le 20 juin se passa en escarmouches entre les Autrichiens et la division Kléber. Le 23, ce général repoussa les Impériaux dans leur camp, à la Chapelle-Herlaimont. Championnet et Dubois les poursuivirent jusqu’au delà de Genappes.

    Instruit de l’acharnement des Français à se maintenir sur la rive gauche de la Sambre, et de leur désir de s’emparer de Charleroi, le prince de Cobourg, qui , pour garder l’Escaut, était demeuré jusqu’à ce moment à Tournai, avec l’armée anglaise et la réserve de l’armée autrichienne forte de quinze à seize mille hommes, s’approcha de la Sambre, et arriva à Nivelles le 23 juin.

    Pendant ce temps, le général du génie Marescot poussait avec rapidité les opérations du siège. Quoique le nombre des troupes assiégeantes ne se montât qu’à sept mille cinq cents hommes, les attaques terminées en dix jours se succédèrent avec beaucoup plus de rapidité qu’en 1748 où les Français avaient assailli cette même place avec de bien plus grands moyens.

    Cependant, malgré les talents distingués de cet officier-général, et une promptitude d’exécution peu commune, le commissaire du comité de salut public, Saint-Just, s’indisposa contre Marescot.

    Le motif de cette haine fut de s’être opposé dans un conseil de guerre à l’opinion de cet homme inexpérimenté, qui voulait qu’on prît Charleroi par escalade. Il lui avait représenté que, d’après une reconnaissance exacte de la place, il regardait un assaut comme impossible, et estimait que cette entreprise ferait verser inutilement du sang.

    Le barbare Saint-Just, piqué, de ces justes observations, donna ordre par écrit au général Jourdan de faire arrêter et fusiller Marescot, ainsi que le général Hatri qui commandait le siège, et le général Bollemont commandant l’artillerie, sous prétexte que ce siège marchait trop lentement.

    Le général Jourdan eut le courage de se refuser à l’exécution de cet ordre atroce, dans un temps où toute résistance aux volontés des barbares proconsuls était punie de mort, et conserva ainsi à la France, Hatri, Bollemont et Marescot, dont les talents, les services et le courage devinrent si utiles pour emporter les places fortes avec une rapidité et une audace inconnues jusqu’à nos jours.

    Le 25 juin, le gouverneur de Charleroi demande à capituler. Saint-Just répond : Je suis arrivé en hâte ; j’ai oublié ma plume ; je n’ai pris qu’une épée. Le commandant, craignant un assaut, se rendit à discrétion le 25 juin.

    Charleroi n’était plus qu’un monceau de ruines, et, pour se servir de l’expression du rapport, un poste militaire. L’armée du prince de Cobourg marchait déjà pour dégager cette place dont les généraux autrichiens ignoraient la reddition, quand ils se disposèrent à livrer la bataille de Fleurus.

     

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