Le combat de Séminara
D’après « Nouveau dictionnaire historique des sièges et batailles mémorables » – 1809
La maison de Bourbon, dépossédée du trône de Naples, se réfugia, en 1806, en Sicile. Le voisinage de cette île entretenait les espérances, dont ses flatteurs ne cessaient de la bercer.
Parmi eux se trouvait le prince de Hesse Philippstadt. Il avait acquis quelque renommée par sa défense de Gaëte, quoique tous ses efforts n’eussent pu la soustraire au pouvoir des Français. Il conservait un vif ressentiment de cet échec, et depuis longtemps il s’était associé aux projets de vengeance de la reine Caroline. Ses espions lui firent croire à la possibilité de faire une nouvelle expédition en Calabre, dont il se hâta de donner le plan.
Plusieurs mois cependant s’écoulèrent, sans qu’il pût trouver l’occasion de l’exécuter. Il ne parvint à se mettre en mesure qu’à la fin du mois de mai 1807. L’or et les promesses de la reine Caroline ne purent rallier qu’un petit nombre d’hommes cruels et féroces, qui n’ayant plus rien à perdre, pouvaient retirer quelqu’avantage du désordre qu’ils voulaient exciter. Le prince avait le projet de débarquer à Reggio avec ce qu’il pourrait réunir de troupes régulières. Il espérait que la réputation qu’il avait acquise à Gaëte lui attirerait des partisans, et il comptait sur la conquête de la Calabre et de la Basilicate.
Quelques hordes de brigands disséminés çà et là, sur la côte, lui avaient juré de massacrer tous ceux qui n’embrasseraient pas son parti, ou de se faire exterminer eux-mêmes. Le général Brochard débarquant à Policastro, avait pour mission de favoriser les rebelles de la Basilicate et de Salerne, de serrer de près le général Régnier, et de lui couper la retraite. Le prince de Canosa, suivant les traces de Fra-Diavolo, était chargé de se présenter sur Sperlonga, et de soutenir la révolte fomentée dans la terre de Labour.
En même temps, plusieurs navires napolitains et siciliens devaient s’approcher du Vésuve, et débarquer des troupes prés des forts dont on espérait pouvoir corrompre la fidélité des garnisons.
Au même instant, le feu mis dans les quartiers les plus populeux de la capitale, devait assurer le succès d’une conspiration ourdie depuis longtemps, et un bombardement terrible, augmenter les désastres de cette journée. Les familles à immoler, et les maisons condamnées au pillage, étaient désignées.
Six mille hommes, commandés par le général de Hesse-Philippsladt, débarquèrent effectivement à Reggio. La police connaissait tous les points de débarquements. Plein de confiance dans ses forces, le roi Joseph Napoléon ordonne au général Régnier de ne mettre aucun obstacle au débarquement des conjurés, et de se retirer même à leur approche, pour leur inspirer une confiance qui devait leur être funeste.
Le général Régnier évacue Seminara, Rossano et Mileto. Le général Philippstadt ne s’apperçoit point du piège qu’on lui tend ; il fait avancer sa troupe et menace Monte-Leone. Mais le roi Joseph Napoléon, ne voulant pas abandonner à un conquérant barbare une ville aussi fidèle, envoya ordre au général Régnier, qui venait d’être renforcé par une partie des troupes stationnées dans la Calabre, d’attaquer.
Le combat fut livré le 28 mai. Le corps du général Phihppstadt fut culbuté, détruit, ou forcé de se rendre. A peine quelques cavaliers purent gagner Reggio. Le prince de Hesse se sauva avec eux. Le détachement qui marchait à sa poursuite arriva un quart d’heure après lui à Séminara. Tout ce qui échappa aux baïonnettes fut fait prisonnier. Le corps entier de cette expédition consistait en quatre mille hommes d’infanterie et cinq cents chasseurs. Les conjurés ne regardaient cette petite troupe que comme un noyau auquel devaient se rallier leurs anciennes bandes. Le général Régnier arriva à Reggio dix minutes après l’embarquement du prince de Hesse.
Le mauvais succès de cette expédition découragea la cour de Palerme, empêcha l’envoi d’un second convoi chargé de munitions et de nouvelles troupes destinées à renforcer celles qui avaient été les premières envoyées en Calabre, et démontra l’impuissance de la reine Caroline pour renverser un trône fondé sur les débris du sien.