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  • Le 15 mars 1915 – La prise de l’éperon Sud de Notre-Dame-de-Lorette dans EPHEMERIDE MILITAIRE le-grand-eperon-150x150

     

    La prise de l’éperon Sud de Notre-Dame-de-Lorette

    D’après « La Grande guerre du XXe siècle »

    (15-18 mars 1915)

     

    Entre Arras et La Bassée, une crête domine le plateau, qu’elle barre du Nord-Ouest au Sud-Est. Le bois de Bouvigny en couvre le sommet. Une petite chapelle dédiée à Notre-Dame de Lorette en marque vers l’Est, l’extrémité.

    C’est autour des ruines de cette chapelle que l’on se bat depuis plusieurs mois.

    Les pentes descendantes de la colline se déploient en éventail vers les villages d’Ablain-Saint-Nazaire et de Souchez, au Sud, et la route nationale de Béthune à Arras, à l’Est.

    Des ravins sillonnent ces pentes, les découpant en une série de tranches que nos officiers, dans le langage convenu qu’impose une définition précise du terrain, appellent « les côtes du melon ».

    De ces côtes, la plus saillante et la plus escarpée se trouve au-dessus du village d’Ablain. C’est l’éperon Sud de Notre-Dame-de-Lorette.

    Les Allemands tenaient cet éperon. Ils y avaient organisé quatre lignes de tranchées reliées par des boyaux de communication aux premières maisons d’Ablain. La position leur donnait la facilité de grouper éventuellement leurs troupes d’attaque dans le village et de les dérober à l’abri du ravin pour les conduire vers nos tranchées.

     

    L’attaque du 158e régiment d’infanterie

    L’éperon a été enlevé le 15 mars par un bataillon du 158e d’infanterie.

    Cette action marquera une page glorieuse dans l’historique de ce corps qui, après avoir tenu garnison en Savoie, avait été l’an dernier envoyé à notre frontière de l’Est. En Alsace, dans les Vosges, sur la Marne, en Belgique, le 158e s’est déjà illustré par le sang-froid et la résolution de ses officiers et l’ardente bravoure de ses troupiers. L’attaque de Notre-Dame-de-Lorette n’a pas été moins brillante que celles où le régiment fut précédemment engagé, mais elle révèle plus de maîtrise dans l’art de combattre, une aptitude manœuvrière plus souple et plus précise. L’esprit de sacrifice et l’énergie demeurent incomparables.

    Le 15 mars, dans l’après-midi, notre artillerie ouvrit sur les positions allemandes de l’éperon Sud un feu violent. Au milieu de cette rafale, le commandant Dupont fit sortir des tranchées la compagnie du capitaine Maire chargée de l’attaque de front. Les deux pelotons gravirent l’un après l’autre par des échelles le parapet de la tranchée et vinrent s’aligner sur le glacis dans un ordre parfait.

    Toute la ligne s’avança de 60 mètres, puis, sur un signe du chef de bataillon qui accompagnait l’attaque, s’arrêta et se coucha devant le rideau de feu et de fumée de nos obus éclatant sur les ouvrages allemands.

    Dès l’allongement du tir, d’un bond, la compagnie se rua sur la tranchée. A moitié détruite, la tranchée ne contenait plus que quelques défenseurs.

    Avec entrain, la ligne d’attaque poussa de l’avant au milieu des entonnoirs creusés par nos obus, dépassa la deuxième tranchée et parvint jusqu’à l’emplacement des troisième et quatrième lignes, sur un terrain complètement ravagé et bouleversé par notre artillerie.

    Quand la fumée de la canonnade fut dissipée, on vit les fractions du 158e, sans se hâter, explorer les abords de la position et se mettre en devoir de l’organiser. Malgré une fusillade nourrie, malgré les obus ennemis qui commençaient à tomber sur l’éperon, le travail s’exécuta avec méthode sous les ordres du capitaine Maire, qui, debout hors des tranchées, encourageait ses hommes.

    C’est à ce moment que cet officier d’élite tomba frappé à mort. Le capitaine Maire avait fait toute la campagne sans avoir été atteint. Au mois d’octobre, il avait déjà affirmé sa valeur en contenant avec deux compagnies, à La Bassée, des forces supérieures de la cavalerie de la garde, et avait été cité pour ce fait à l’ordre de l’armée. Il avait depuis longtemps fait le sacrifice de sa vie. Le 31 décembre dernier, il écrivait à un ami : « Comment se fait-il que je puisse encore saluer l’aurore d’une année ? ».

    Tandis que la compagnie du capitaine Maire menait l’attaque de front, une autre compagnie débordait les tranchées par la droite. Une section, progressant également par la gauche, poursuivait les Allemands en fuite vers Ablain.

    Dans leur ardeur, nos soldats dépassèrent même le but qui leur était prescrit. Emporté par son élan, le sous-lieutenant de Roquetaillade, qui commandait la section de gauche, s’élança derrière des fuyards allemands jusqu’aux premières maisons du village, et tomba frappé d’une balle.

    Plus heureux, le soldat Bonneau, parvenu seul devant les maisons d’Ablain, captura quatre Allemands, les désarma et les ramena.

    Un groupe de troupiers conduit par les sergents Morel et Claude, bien que rappelé par son lieutenant, demeura au rebord de la crête, parce que, dirent les sous-officiers, « on pouvait mieux tirer sur les Allemands qui filaient ».

    Cette poignée d’hommes, surprise par la fusillade de l’ennemi qui s’était ressaisi, fut obligée de se terrer en avant des lignes que nous avions conquises, et y demeura vingt-six heures sous le feu de l’ennemi.

    Le résultat de cette attaque énergique avait été la prise de tout l’éperon, avec deux mitrailleuses, un poste téléphonique, des armes, des explosifs, cent dix prisonniers, dont trois officiers. Une centaine de cadavres allemands gisaient sur le terrain.

     

    La contre-attaque allemande

    En raison de l’importance de la position conquise, on ne pouvait supposer que l’ennemi resterait sur cet échec. Dans la nuit du 15 au 16, la contre-attaque prévue se déclencha. Elle fut massive, menée en colonne par quatre, par trois compagnies du 110e badois, et une compagnie de la garde badoise.

    Reçue à très courte distance par des feux de mitrailleuses, l’une des colonnes fut fauchée. Une autre, vers la gauche, parvint jusqu’aux boyaux que nous occupions sur les pentes.

    Le sergent Blond, avec sa section, fut enveloppé à l’extrémité d’un boyau. Désarmé, il engagea un corps à corps avec ses adversaires et réussit à ramener une partie de ses hommes dans nos lignes en contournant l’éperon.

    Mais l’ennemi remontait vers la crête par le boyau. Le sous-lieutenant Bois, avec sa section, lui opposa des barrages successifs. Après deux heures de lutte, il se maintenait encore au rebord du plateau. Mais il n’avait plus avec lui qu’une douzaine d’hommes : plus de cartouches.

    L’ennemi lui criait de se rendre, tandis que, revolver au poing, il défendait la dernière barricade.

    L’arrivée d’une section conduite par le sergent Lyonnet rétablit heureusement la situation en notre faveur. Ce sous-officier attaqua avec vigueur la tête de colonne allemande et l’obligea à reculer.

    Toutes les tranchées de l’éperon demeuraient en nos mains. Les Allemands étaient refoulés dans des boyaux qui descendent de la crête vers le village.

     

    Le bombardement de l’éperon

    Après l’échec de sa contre-attaque, l’ennemi entreprit dans la journée du 16 mars, le bombardement de la position perdue. Celle-ci était facile à battre, étant exposée aux vues, et peu étendue.

    Nos troupiers, qui n’avaient pas eu le temps de réorganiser les abris bouleversés par notre artillerie, se montrèrent, sous le tir de l’artillerie lourde, aussi calmes et résolus qu’ils avaient été la veille à l’attaque, ardents et prompts.

    Les obus avaient détruit les communications téléphoniques. Le soldat Pichon, pendant toute la journée, assura la transmission des ordres et des renseignements, en passant à découvert sur l’éperon balayé par la canonnade et le feu des mitrailleuses.

    Nos pertes, au cours de cet après midi, furent malheureusement sérieuses. Un obus tua dans son poste de commandement le chef de bataillon Dupont qui avait mené l’attaque. Depuis le début de la campagne, cet officier payait sans cesse de sa personne. Il était fier de son bataillon, et celui-ci avait eu à cœur une fois de plus de se montrer digne d’un tel chef.

    A la nuit, le bataillon fut relevé. L’ennemi n’avait pu attaquer à nouveau, le tir de nos batteries lui ayant interdit de sortir de ses tranchées.

     

    L’attaque du 18 mars

    Le 18 mars, une compagnie du 158e achevait la conquête de l’éperon en rejetant les Allemands des boyaux de communication entre la crête et Ablain.

    Ce fut une lutte très âpre, tournant au corps à corps.

    Le lieutenant Bour reçut à bout portant, une balle tirée par un vice-feldwebel. Le projectile, heureusement, fut arrêté par la cartouchière dont il fit fuser les cartouches. Le lieutenant, renversé par la commotion, se redresse, tue le sous-officier. Les autres soldats allemands cherchent à s’enfuir. Six d’entre eux, rejoints, mettent bas les armes, et le lieutenant délivre dans le boyau un soldat français blessé, fait prisonnier depuis l’avant-veille.

    Les ouvrages allemands furent détruits.

    Tel a été le rôle du 158e régiment dans la prise de l’éperon Sud de Notre-Dame-de-Lorette. Ce rôle a valu au lieutenant-colonel Mignot les félicitations de tous ses chefs, pour les admirables vertus militaires qu’il a su inspirer aux hommes placés sous ses ordres.

     

    [Communiqué officiel français du 24 mars 1915]

     

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