L’attaque d’Hanoï
D’après « Les Hauts faits de l’armée coloniale » – F. Bertout de Solières – 1912
Pendant que l’officier de marine Francis Garnier partait pour conquérir le Delta du Tonkin, Hanoï était resté sous la garde de M. Bain. Les choses ne tardèrent pas à se gâter.
L’ennemi commença d’abord à reprendre le fort de Phu-Hoaï, un avant-poste de Hanoï. L’aspirant Perrin essaya en vain de le reprendre, ce fut notre premier échec.
Francis Garnier revint sur l’Espingole le 18 décembre. Il conçut le projet de reprendre le fort en l’assurant entre trois feux. Malheureusement, on ne lui en laissa pas le temps.
Le 21, dimanche, après la messe, la garnison française s’était répandue dans les casernements pour prendre le repas du matin. Garnier se trouvait avec ses officiers chez l’évêque Mgr Puginier. Tout à coup, un interprète se précipite en criant : La citadelle est attaquée !
Le rassemblement s’opère aussitôt. Les marins prennent les armes et Perrin se dirige vers le bastion menacé, tandis que Bain surveille les autres faces de la citadelle. A son tour, Garnier monte sur la porte faisant face à l’ennemi.
Sur les chaussées des rizières, les bannières s’agitent. Les Annamites braquent quelques pierriers sur les remparts et commencent un feu d’enfer, heureusement peu redoutable. Les Mandarins avec leurs éléphants sont en arrière, à courte distance.
Garnier cherche à calmer l’émotion autour de lui : Ce ne sera rien, crie-t-il ; bon courage !
Il fait aussitôt avancer une pièce de 4, dont les projectiles forcent les Pavillons Noirs à rebrousser chemin. Le mouvement de retraite s’accentue rapidement. Les rebelles prennent deux routes, l’une allant vers Phu Hoaï, l’autre longeant l’enceinte d’Hanoï jusqu’à Thu-lé pour se diriger ensuite sur le même point.
- Il faut les poursuivre, déclare Francis Garnier, pour ne pas les laisser s’abriter derrière ces digues d’une longueur de 1200 mètres.
Balny partit alors avec 12 hommes de l’Espingole et, suivi de miliciens tonkinois, vint se placer en dehors des parapets devant le point attaqué, se dirigeant sur Phu-Hoaï. Garnier partit par l’autre route avec 1 canon, 18 Français et des volontaires. Clairons sonnants, la petite troupe s’élance au pas de course. Garnier coupe à travers les rizières, la pièce restant sous la garde de 3 servants.
L’héroïque marin va, le révolver au poing, criant toujours : En avant mes enfants !
Il arrive devant un remblai qu’il essaye d’escalader. Trois hommes et lui réussissent à sauter sur la digue, ils sont salués d’une décharge épouvantable. Le sergent-fourrier Dagorne est frappé d’une balle à la poitrine, le caporal Guérin est blessé à la tête, le troisième recule.
Garnier reste seul, épuisant ses cartouches et appelant au secours. Il ne tarde pas à être entouré et décapité. Ses hommes qui avaient tourné le village de Thu-lé arrivent sur ces entrefaites mais ne peuvent que recueillir ces tristes dépouilles qu’ils transportent en toute hâte à Hanoï.
Pendant ce temps, l’autre colonne continue sa route. Un matelot, Bonifay, est tué. Plus loin, au cours d’un assaut de la digue, Sorre est blessé mortellement. Balny est enveloppé et disparaît emporté par les Pavillons noirs. Les blessés sont nombreux.
Le docteur Chédan rallie derrière une pagode les dix hommes qui lui restaient et bat en retraite rapportant seulement le corps de Bonifay, les autres ayant été enlevés par les Chinois.
Trois heures après, les renforts venant de Cochinchine étaient annoncés. Ils arrivaient 4 jours après ! Trop tard, hélas, le malheur était irréparable.
Pour en savoir plus sur Francis Garnier