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  • 24 novembre 2012 - Par Au fil des mots et de l'histoire

     

     Le 24 novembre 1836 – Le combat de Somah dans EPHEMERIDE MILITAIRE le-combat-de-somah-150x150

     

    Le combat de Somah

    D’après « Histoire du règne de Louis-Philippe Ier » – Victor de Nouvion – 1861

     

    Au commencement de novembre, le maréchal Clausel arriva à Bone, où débarqua, de son côté, M. le duc de Nemours, et où se réunissaient les troupes désignées pour l’expédition. C’était précisément l’époque de l’année où les fièvres sévissent dans cette partie de la Régence. De plus, le temps était affreux. Pendant plusieurs jours, le vent souffla en tempête.

    Après les souffrances d’un pénible voyage le long de la côte, bon nombre de soldats ne descendaient à terre que pour entrer dans les hôpitaux, où furent bientôt entassés près de deux mille malades. Et ce ne fut pas là le seul mécompte. Au moment de se mettre en marche, l’on reconnut que l’armée manquait des moyens de transport et d’approvisionnement que la plus vulgaire prévoyance commandait de lui assurer.

    De quinze cents mulets que Yusouf s’était engagé à faire fournir par les tribus, on ne put en obtenir que quatre cent cinquante à peine. On n’avait pas assez de voitures, et une partie de celles qu’on avait ne purent être attelées. Le service même de l’ambulance n’était qu’incomplétement organisé. Mais le maréchal, qui s’attendait à voir partout les populations accourir en amies autour de leur nouveau bey, ne conçut de cette pénurie aucune inquiétude.

    Le 12 novembre, l’armée était réunie au camp de Dréan. Elle comptait environ sept mille hommes d’infanterie, quinze cents de cavalerie, d’artillerie et du génie, et était divisée en deux brigades, commandées, la première, par le maréchal de camp de Rigny, la seconde, par le maréchal de camp Trézel. Une petite brigade de réserve était sous les ordres du colonel Petit d’Hauterive.

    Dans la première brigade, se trouvait un corps d’un millier d’auxiliaires indigènes, conduit par le commandant Yusouf. L’artillerie, comprenant huit pièces de campagne et deux batteries d’obusiers de montagne, avait en tout quatorze cent soixante coups à tirer. Enfin l’armée emportait quinze jours de vivres, dont sept dans les sacs des soldats. On n’aurait pu se réduire à de plus faibles moyens, s’il s’était agi d’une promenade militaire en pays soumis.

    Le 13 novembre, le temps paraissant s’être remis au beau, l’ordre du départ fut donné. Mais dès la première nuit, le temps redevint affreux, et un violent orage ayant jeté l’épouvante dans un troupeau de bœufs de l’administration, un grand nombre de ces animaux se dispersèrent dans la campagne et ne purent être retrouvés, ce qui diminua d’autant les faibles ressources de la colonne.

    L’armée avait à parcourir une distance de trente-six lieues, sans routes tracées, dans un pays montueux et accidenté, coupé par des rivières débordées ou par des torrents profondément encaissés et grossis par les pluies. Le sol détrempé rendait la marche extrêmement fatigante, et les efforts des attelages ne parvenaient qu’avec la plus grande peine à tirer le convoi des boues où il s’enfonçait. On n’avançait que lentement.

    Le 15, on bivouaqua sur la rive gauche de la Seybouse, à la hauteur des ruines romaines de Guelma, situées sur la rive opposée. Ces ruines présentant une enceinte quadrangulaire qui pouvait être facilement défendue, le maréchal y laissa, sous la garde de cent cinquante hommes, ses malades au nombre de deux cents, et deux cent mille cartouches que la désertion des muletiers arabes le mettait dans l’impossibilité d’emporter.

    Le 16, dans la journée, l’armée était à Medjès-Amar, où elle devait traverser la Seybouse ; mais elle trouva sur ce point les bords tellement escarpés, que force lui fut de s’arrêter jusqu’à ce que le génie y eût pratiqué des rampes. Et ce fut seulement le lendemain qu’elle franchit la rivière pour aller bivouaquer aux ruines d’Anouna, à mi-côte de la montée de Djébel-Sada.

    Le 18, le génie eut encore d’énormes travaux à exécuter pour débarrasser le flanc de la montagne des roches qui mettaient obstacle au passage des voitures, et l‘on alla coucher à une lieue au delà du col de Ras-el-Akba, surnommé par les Arabes le coupe-gorge. Sur ce point élevé, la montagne est complétement dépourvue de bois, et nos troupes, dans l’impossibilité de faire cuire leurs aliments, commencèrent en outre à souffrir beaucoup du froid, devenu très vif.

    Le 19, après avoir monté encore, on campa à Ras-Oued-Zénati. Toute la nuit, la pluie, la neige, la grêle tombèrent avec une abondance diluvienne ; et nos malheureux soldats, sans feu, sans abri, sur un sol transformé en marécage, n’avaient que la résignation à opposer aux rigueurs de la température. Le lendemain, ce fut pis encore. On se remit en route par une pluie glaciale et un froid sibérien, et l’on gagna un lieu nommé Somah, où l’armée s’arrêta pour y passer la nuit. Le bois manquait toujours. Les soldats, vaincus par la fatigue, n’essayaient même plus de lutter contre l’engourdissement qui les gagnait. Un grand nombre eurent les pieds gelés. Beaucoup aussi, endormis de ce funeste sommeil qui est l’agonie de ceux que le froid a saisis, ne se réveillèrent pas, et l’on trouva leurs cadavres roidis à la place où ils s’étaient étendus. Quelque lente que fût la marche des troupes, le convoi n’avait pu la suivre, et ce ne fut qu’avec des peines infinies, en doublant et en triplant les attelages, qu’on parvint enfin à l’amener.

    Le 21, on arriva sur les bords de l’oued-Akmimin, que l’on trouva débordé, et que les soldats traversèrent en ayant de l’eau jusqu’à la ceinture. Les voitures étaient restées à une demi-lieue en arrière, enfoncées dans la boue. En cet endroit, l’armée n’était plus qu’à deux lieues de Constantine, qu’elle voyait, depuis la veille, se dresser devant elle.

    Jusque-là, on n’avait point eu à combattre. Mais on avait vainement attendu les auxiliaires qui, suivant les assurances de Yusouf, devaient accourir se ranger sous nos drapeaux. Même, le 20, on avait aperçu un corps considérable d’ennemis qui, sans accepter la bataille, surveillaient les mouvements de l’armée. Cependant le maréchal n’était pas désabusé encore. A peine eut-il passé l’Akmimin, qu’il se porta en avant avec son étatmajor et une faible escorte, sur le plateau de Mansourah, afin de donner, par sa présence, le signal du soulèvement qui devait lui ouvrir les portes de la ville. Il fut reçu à coups de canon.

    Il n’y avait plus à se faire illusion, et la réalité apparaissait enfin menaçante, terrible. Faire un siège, il n’y fallait pas penser. L’armée, épuisée par cette lutte de neuf jours qu’elle venait de soutenir à la fois contre les intempéries et contre le sol, avait consommé déjà ou perdu les deux tiers de ses vivres. Elle n’avait pas de matériel de siége et avait même dû, pour alléger ses voitures, se débarrasser de quelques échelles qu’elle avait emportées. Elle avait laissé en chemin une partie de ses munitions. Enfin les souffrances de la route avaient multiplié le nombre des malades, et beaucoup réduit l’effectif sous les armes. Et le temps continuait à être affreux. La neige tombait toujours. Le froid était excessif. La retraite était devenue inévitable, à moins qu’on ne parvint à s’emparer de la ville par un coup de main. Le maréchal voulut le tenter.

    Or, la position de Constantine est formidable. Assise sur un plan incliné, cette ville est séparée du plateau de Mansourah et défendue de trois côtés par un ravin de soixante mètres de largeur, d’une profondeur considérable, au fond duquel coule l’oued-el-Rummel, et qui présente pour escarpe et contrescarpe un roc à pic, inattaquable par la mine comme par le boulet. Le quatrième côté, où l’on arrive par le plateau de Coudiat-Ati, était protégé par un mur d’enceinte en parfait état.

    On entre dans la ville par quatre portes, dont trois s’ouvrent sur le Coudiat-Ati. L’autre, nommée Bab-el-Cantara, communique avec le Mansourah par un pont étroit jeté sur le ravin, et que couvre le feu de mousqueterie des maisons et des jardins qui le dominent.

    Évidemment le point d’attaque était le Coudiat-Ati. La brigade de Rigny y prit position après avoir passé le Rummel à gué, et refoulé dans la place une partie de la garnison qui s’était portée à sa rencontre. Mais l’artillerie de campagne était tellement embourbée sur le Mansourah qu’il fut impossible de la conduire plus loin, et que le général de Rigny en fut réduit à ses obusiers de montagne impuissants contre des murailles. En même temps, le maréchal ordonnait au commandant Changarnier d’occuper le Bardo, bâtiment situé à petite portée de fusil de l’enceinte, et d’y faire flotter notre drapeau, « ce qui, disait-il, pourrait faire impression dans la ville ». Le drapeau fut déployé, et ne produisit d’autre effet que de faire pointer contre le Bardo les canons de la place.

    Le 22, au matin, le convoi était encore à une lieue de Mansourah, immobile dans la boue, sous la garde d’une partie du 62e de ligne. Des chevaux de renfort envoyés pour le dégager n’y purent parvenir. Le maréchal venait de donner l’ordre de transporter au camp, à dos de mulets, le chargement des prolonges de l’administration, lorsqu’il apprit que les soldats de l’escorte, cédant à une tentation devenue irrésistible, s’étaient mutinés, avaient pillé les vivres, défoncé les tonneaux, et s’étaient gorgés de vin et d’eau-de-vie. La plupart alors, rendus par l’ivresse incapables de se défendre et presque de se mouvoir, tombèrent sous les coups des Arabes, qui emportèrent leurs têtes à Constantine.

    Ahmed-bey, qui avait laissé la défense de la ville à son lieutenant Ben-Aïssa, tenait la campagne avec une nombreuse cavalerie, et menaçait la brigade de Rigny contre laquelle il fit quelques démonstrations. Pendant ce temps, le maréchal faisait canonner la porte d’El-Cantara, afin de tenter de pénétrer dans la ville par ce côté.

    Le soir, à huit heures, le génie ayant enfin rejoint le camp avec ses voitures, le maréchal ordonna au colonel Lemercier de tout disposer pour reconnaître, dans la nuit même, l’état de la porte et pour frayer un passage aux compagnies d’attaque. Le génie venait de passer trente-six heures dans la boue. Il n’en accomplit pas moins cette pénible mission, rendue plus dangereuse encore par un clair de lune, qui permettait aux défenseurs de la place de suivre tous les mouvements des assaillants et de les écraser de leur feu. On reconnut que la porte, arrachée de ses gonds, n’offrait plus de résistance. Mais qu’il en existait par derrière une seconde encore intacte, qui devait être attaquée par le pétard. Cette opération exigeant quelques préparatifs fut renvoyée à la nuit suivante.

    Pendant toute la journée du 23, la brigade de Rigny eut à soutenir l’effort des troupes d’Ahmed, que secondaient des sorties de la garnison. Elle culbuta l’ennemi sur tous les points, sans faiblir un seul instant devant lui. Les Arabes vinrent aussi tirailler sur le Mansourah, mais sans engager sérieusement l’action. L’artillerie ne cessa de canonner la ville. Afin d’obliger les assiégés à diviser leurs forces, le maréchal avait envoyé au général de Rigny, par un soldat qui passa le Rummel à la nage, l’ordre d’attaquer à minuit la porte de Coudiat-Ati, pendant que lui-même attaquerait celle d’El-Cantara. A l’heure dite, la double attaque eut lieu avec une égale ardeur. Celle que conduisait, sur le Coudiat-Ati, le lieutenant-colonel Duvivier, fut repoussée avec des pertes considérables. Celle de la porte d’El-Cantara fut plus malheureuse encore. Le général Trézel avait disposé lui-même, en deçà du pont, le 59e et le 63e de ligne, qui devaient protéger le travail des troupes du génie.

    Mais, par une véritable fatalité, la lune, qui brillait de tout son éclat, livrait nos soldats au feu des Arabes. Au passage du pont, les sapeurs du génie furent assaillis d’une grêle de balles qui les décima, et jeta parmi eux quelque confusion. Les sacs à poudre furent égarés parmi les sacs à terre. Trois échelles, les seules qu’on eût pu se procurer, restèrent en chemin, ceux qui les portaient ayant été tués. Néanmoins le génie s’était mis à l’œuvre, lorsqu’un malentendu, qui fit avancer la compagnie franche de Bougie, produisit dans l’étroit espace un funeste encombrement. Le travail était devenu impossible, et chaque coup parti de la place faisait une victime au milieu de cette masse ‘compacte. L’intrépide général Trézel, qui s’était jeté au plus fort du feu pour tâcher de rétablir un peu d’ordre dans ce tumulte, fut renversé par une balle qui lui traversa le cou.

    Il y aurait eu folie à s’obstiner dans une tentative qui n’avait plus aucune chance de succès. Le maréchal rappela à lui les troupes engagées, et envoya au général de Rigny l’ordre de se replier sur le Mansourah, avec assez de rapidité pour avoir terminé son mouvement avant le lever du jour.

    Le général prit immédiatement ses dispositions en conséquence, et confia au commandant Changarnier la tâche honorable et périlleuse de former, avec son bataillon du 2e léger, l’extrême arrière-garde. Mais quelque célérité qu’il eût apportée à se conformer à ses instructions, il ne put opérer sa retraite aussi vite que le désiait le maréchal, et le jour avait paru quand le commandant Changarnier, obligé d’attendre le départ de l’ambulance et de toutes les autres troupes, put se mettre en marche.

    En ce moment, les Arabes sortaient en foule de la ville et engageaient avec les derrières de la colonne une vive fusillade. Le bataillon du 2e léger allait à son tour descendre les pentes qui conduisent à la rivière, lorsque le commandant Changarnier aperçut avec étonnement une quarantaine de soldats français accourant vers lui, éperdus, à travers les tirailleurs ennemis. C’était la grand’garde du 2e bataillon d’Afrique, oubliée dans la précipitation du départ. Le brave commandant fait face en arrière, se porte au pas de charge à la rencontre de ces malheureux, et réussit à en recueillir et à en sauver le plus grand nombre.

    Le lieutenant-colonel Duvivier, qui était déjà sur la rive droite du Rummel et qui avait remarqué ce retour offensif, s’était hâté de couronner les crêtes du ravin, et, modérant par son feu la poursuite des Arabes, protégea le passage du 2e léger.

    Mais déjà l’armée était en pleine retraite et évacuait le plateau de Mansourah. Le sentiment de la situation de cette poignée d’hommes exténués, environnés par un ennemi ardent et implacable, obligés d’accomplir un voyage de plusieurs jours dans un pays âpre et désert, sans munitions et presque sans vivres, avait jeté le découragement dans les cœurs.

    Quatre bataillons de ligne de la brigade Trézel ayant été désignés pour former l’arrière-garde, les autres corps avaient pris leur ordre de marche avec une promptitude qui révélait plus d’intquiétude que de sang-froid. Ces quatre bataillons eux-mêmes, pressés par des flots épais d’ennemis, infanterie et cavalerie, sortis de la ville ou accourus du dehors, abandonnèrent sur le plateau, dans la précipitation de leur départ, des caissons, le matériel du génie, les deux obusiers de Yusouf, et, chose douloureuse à dire mais vraie, quoiqu’elle ait été niée, plusieurs voitures chargées de blessés.

    Au moment où le bataillon du 2e léger, après avoir couvert la retraite de la première brigade jusqu’à sa jonction avec le corps principal, atteignait le haut de la berge droite du Rummel, il fut arrêté par les quatre bataillons, qui, partis les derniers du Mansourah, passaient obliquement devant lui. Loin d’imiter leur précipitation, le commandant Changarnier prend position, reçoit l’effort de l’ennemi, le contient par un feu court mais bien dirigé, puis va occuper, à quelques pas en arrière, une seconde position qu’il n’abandonne encore qu’après l’avoir vaillamment défendue.

    Cependant ces haltes successives, contre lesquelles venaient se briser les efforts des Arabes, devenaient plus périlleuses à mesure qu’augmentait la fureur de l’ennemi acharné à la poursuite. Vers onze heures, le gros de la cavalerie d’Ahmed se réunit pour exécuter une charge d’ensemble, et s’avance en poussant des clameurs sauvages. Réduit alors à environ trois cents hommes, et exposé le premier au choc de cette masse mouvante, le bataillon du 2e léger va être écrasé.

    Le commandant Changarnier arrête sa petite troupe, la forme en carré, et, d’une voix dont le timbre ne trahit pas la plus légère émotion : « Soldats, dit-il, regardez ces gens-là en face ; ils sont six mille, vous êtes trois cents ; la partie est égale. Vive le Roi ! et attention à mon commandement ! ». Ces paroles électrisent les soldats. La confiance du chef se communique à ces braves. Un cri sympathique de Vive le Roi ! lui répond. L’ennemi attendu à portée de pistolet est reçu par un feu de deux rangs qui, sur trois côtés du carré, couvre le sol de cadavres d’hommes et de chevaux.

    Les Arabes, étonnés de tant d’audace, s’arrêtent et se rejettent en arrière. Et s’ils ne cessèrent pas de menacer la colonne, du moins se bornèrent-ils désormais à tirailler à distance.

    « Dans ce moment si grave et si difficile, dit le rapport du maréchal Clausel, M. le commandant Changarnier s’est couvert de gloire, et s’est a attiré les regards et l’estime de toute l’armée. Pendant toute la journée et celles qui suivirent, le bataillon du 2e léger servit à l’arrière-garde avec la même distinction, et fut vaillamment imité par le lieutenant-colonel Duvivier, commandant le bataillon d’Afrique et la compagnie franche de Bougie ».

    Dans ces tristes circonstances, le maréchal déploya ses solides qualités d’homme de guerre. Il réussit à remettre de l’ordre dans sa petite armée à demi démoralisée, et à relever les courages abattus. Le soleil avait reparu, et nos malheureux soldats n’eurent plus, du moins, à lutter contre l’inclémence du ciel. Mais combien succombèrent encore à de si longues fatigues, et à des privations devenues intolérables pour ceux que ne soutenait pas une robuste constitution ! On les voyait se traîner péniblement, puis s’affaisser sur eux-mêmes et s’étendre sur le sol, résignés à y attendre une mort inévitable.

    Et comme on manquait de moyens de transport, la plupart restaient abandonnés à la fureur des Arabes. D’autres cependant, appuyés sur le bras d’un camarade ou recueillis sur le cheval d’un cavalier, parvenaient à continuer leur route. Beaucoup furent ainsi sauvés, officiers.et soldats rivalisant de dévouement et d’abnégation.

    Le premier jour, on bivouaqua à Somah. Le lendemain, 25 novembre, l’armée continua d’être harcelée par les troupes d’Ahmed. Sur le soir, la tête de la colonne ayant peu à peu gagné du terrain sur l’arrière-garde, retardée par l’accroissement du nombre des traînards, la colonne se trouva démesurément allongée. Le général de Rigny craignit que l’ennemi ne profitât de cet état de choses pour se jeter sur le convoi, il envoya prier le maréchal de ralentir sa marche. Bientôt, trompé par un effet de crépuscule, et croyant apercevoir sur son flanc une masse d’infanterie régulière, il céda à une inquiétude exagérée, et se porta lui-même au galop de son cheval jusqu’auprès du maréchal, avec des démonstrations pour le moins imprudentes.

    Cette démarche était doublement blâmable. D’une part, elle laissait momentanément sans chef, devant l’ennemi, le corps dont le commandement était confié au général ; d’autre part, mal interprétée par le soldat, elle causa quelque trouble dans les rangs, et pouvait devenir le signal d’une panique. A ce premier tort, le général en ajouta un autre en s’expliquant devant son chef en termes qui manquaient de calme et de mesure. Le général méritait donc une réprimande.

    Mais le maréchal s‘abandonna à une sévérité excessive, en flétrissant, dans un ordre du jour, comme ayant « seul montré de la faiblesse », un officier qui, dans le cours de cette expédition, avait donné plus d’une preuve de courage et de sang-froid. Cette tache, du reste, ne demeura pas sur l’honneur du général de Rigny. Elle fut effacée par un conseil de guerre appelé à prononcer sur sa conduite.

    Le 26, on découvrit quelques silos dont on se partagea le butin. Heureuse rencontre pour des estomacs affamés ! Ceux qui purent se procurer un peu de feu firent rôtir le grain, les autres le dévorèrent cru.

    La retraite, toujours surveillée par les Arabes, s’acheva sans autre notable incident, et la petite armée rentra à Bone le 1er décembre.

     

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