La bataille de Caldiero
D’après « Histoire de la campagne d’Italie, 1796-1797 » – Pierre Giguet – 1853
Les impériaux occupaient le mont Caldiero, qui barre la grande route, entre le village de ce nom et celui de Colognola. Leur front, d’un développement de trois kilomètres, était couvert de batteries épaulées, et leurs réserves, au besoin, se disposaient à soutenir la position.
Masséna à gauche, Augereau à droite, montèrent à l’assaut, d’abord avec des progrès rapides, mais leurs mouvements, déjà contrariés par une pluie battante que le vent du nord transforma en grésil et qui leur fouetta le visage, furent contenus par des renforts. Ils regagnèrent tous deux leurs positions premières. La pluie, la neige ne cessèrent pas de détremper le sol.
Le général en chef ne crut pas pouvoir renouveler l’attaque avec le succès qu’il voulait obtenir d’une bataille, il ramena les troupes dans Vérone. Alvinzy poussa ses avant-postes jusqu’à Saint-Michel, village situé sur un pli de l’Adige, à deux kilomètres des glacis.
Tout semblait perdu. Vaubois réduit à huit mille hommes s’attendait à une attaque formidable et au feld-maréchal victorieux, on n’opposait plus que quinze à seize mille combattants. Enfin, la division de siége, forte de huit à neuf mille hommes avait peine à contenir la garnison de Mantoue. Les partisans de l’Autriche triomphaient et croyaient toucher à l’heure où les Français allaient expier tant de victoires. Dans ce moment solennel, l’armée redoubla de courage, son chef redoubla de génie.
On n’a pas pu enlever de front ni tourner par la droite les hauteurs de Caldiero. Il va les tourner par la gauche.
Les impériaux sont flanqués de ce côté par un vaste marais qui s’étend entre l’Alpone, l’Adige et les montagnes, mais plusieurs digues traversent le marais.
Les plus remarquables dans leur rapport avec le plan de Bonaparte sont : 1° celle qui, à partir du confluent de l’Alpone, suit à peu près les contours de l’Adige jusqu’à Belfiore di Porcile à l’entrée de la plaine ; 2° celle qui part du bac de Ronco, passe, à un kilomètre du rivage, par la Zerpa, où elle se croise avec la précédente, se rapproche de l’Alpone, le côtoie, aboutit au pont d’Arcole, traverse ce village et conduit à Villanova sur la chaussée de Vicence. Cette dernière est liée à l’autre, au moyen d’un prolongement de deux kilomètres le long de l’Alpone.
Il résulte de cette disposition des localités que la Zerpa est un triple point de départ : à gauche pour Porcile, au centre pour Arcole, à droite pour le confluent de l’Alpone.
Bonaparte fait jeter à Ronco, village de la rive droite, un pont de bateaux qui aboutit sur l’autre rive au débarcadère du bac. Pendant que cette construction s’opère, l’armée reste immobile à Vérone et passe dans une anxiété extrême deux longues journées. Enfin, au soir, le tambour bat, on prend les armes, et, à la grande surprise des habitants et de la troupe, l’ordre est donné de sortir par la porte de Milan.
Aussi longtemps que l’on défile dans les rues de Vérone, l’armée est saisie d’une émotion douloureuse. On fait donc retraite ! On abandonne donc l’Adige, on livre donc aux généraux victorieux, le Mantouan, le Milanais, l’Italie !
Mais à peine la porte franchie, ces cruelles réflexions font place à l’espérance. La tête de colonne tourne à gauche et l’on descend en silence les bords du fleuve jusqu’à Ronco. On voit le pont, le plan de Bonaparte se dévoile, la confiance renaît dans tous les cœurs.
Alvinzy est en position sur la hauteur de Caldiero. Ses parcs, ses équipages, ses réserves à Villanova, à la rive gauche de l’Alpone ; ses avant-postes aux glacis de Vérone. S’il marche sur la place où Kilmaine est resté avec cinq mille hommes, on s’attache à ses pas, on le prend en queue, on l’accule aux remparts ; s’il revient sur ses réserves, il les trouve enlevées, sa retraite est coupée, on l’enferme entre l’Alpone et le fleuve ; enfin, si le combat s’engage dans les marais, l’espace manque pour se déployer, les têtes de colonnes seules peuvent se heurter, la valeur doit l’emporter sur le nombre.
L’armée, frappée de cette admirable combinaison, franchit avec ardeur le pont de Ronco. Augereau, passant le premier, prend à la Zerpa la digue qui mène directement à Arcole. Ses trois demi-brigades sont conduites par trois des plus braves généraux, Bon, Verdier et Lannes, car il s’agit de payer d’exemple. Les soldats contemplent avec attendrissement le dernier, convalescent encore et pâle de ses blessures.
C’est Augereau, qui, en poussant jusqu’à Villanova, doit porter le coup décisif, et il faut préalablement, qu’à l’extrémité de la digue, il tourne à droite et traverse le pont, puis le village d’Arcole.
Ce petit pont en bois long de trente pieds, ce petit village, jusque-là bien ignorés et dont le nom est impérissable, furent l’occasion d’un combat de géants. La bataille dura trois jours, mémorable par l’intrépidité que des deux parts on déploya.
oursaire on 7 mars 2013
J’adore l’histoire mais il faudrait faire un résumé pour les élèves de toutes classes qui aimeraient s’inspirer de votre texte.
Muondo on 25 mai 2013
Excellent blog.
Merci pour ces moments d’érudition.