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    Le 22 mars 1421 - La bataille de Baugé dans EPHEMERIDE MILITAIRE La-bataille-de-Baugé-150x150

     

    La bataille de Baugé

    D’après « Victoires, conquêtes, désastres, revers et guerres civiles des Français » – 1822

     

    De Melun, le dauphin Charles s’était retiré à Bourges, puis à Poitiers. Ses partisans, peu nombreux, s’efforçaient d’arracher aux Anglais et aux Bourguignons quelques lambeaux de ce misérable royaume, déchiré par les guerres intestines et par les armes britanniques.

    Henri V, grâce aux fureurs et au délire des Français, faisait des progrès effrayants. Sans interrompre ses conquêtes, il traitait à la fois avec le dauphin et le duc de Bourgogne, et chacun de ces princes traitait à la fois avec l’autre et le roi d’Angleterre. La crainte d’un accommodement entre les deux nations, dont les conditions eussent pu être fatales au dauphin, engagea les conseillers de celui-ci à sacrifier ou à dissimuler leur haine. Ils annoncèrent la parfaite réconciliation du jeune prince avec le duc de Bourgogne, et il y eut à cette occasion des entrevues de ces deux princes, l’une à Poilly-le-Fort, entre Melun et Corbeil, l’autre sur le pont de Montereau-Fault-Yonne. Dans cette dernière, le duc de Bourgogne fut assassiné par les seigneurs de la suite du dauphin.

    Les circonstances de ce dernier événement n’ont jamais été bien connues ; elles sont rapportées diversement par les écrivains contemporains, selon le parti qu’ils soutiennent. Notre opinion est qu’il est permis, au milieu de ces récits contraires, de conserver des doutes favorables au dauphin.

    Les uns veulent que l’assassinat du duc ait été prémédité de la part du jeune prince ; qu’il ait employé l’intrigue pour attirer son ennemi dans le piège ; qu’il ait gagné la dame de Giac, maîtresse de Jean Sans-Peur, et que celui-ci ne soit venu au rendez-vous, malgré des répugnances assez fortes, que par un effet de sa soumission aveugle aux volontés de cette femme.

    D’autres relations affirment que le duc de Bourgogne s’attira son sort par un ton insolent et des gestes menaçants, ou au moins suspects, qui firent craindre pour la sûreté du dauphin, et qui déterminèrent les seigneurs de sa suite a mettre l’épée à la main pour le défendre.

    Une troisième version est qu’il y eut un malentendu, réel ou affecté, fondé sur ce que le duc de Bourgogne, qui s’était jeté aux genoux du dauphin, porta, en se relevant, la main sur son épée qui s’était embarrassée dans ses vêtements.

    Quoi qu’il en soit, ce fut surtout Tanneguy du Châtel que la voix publique accusa du meurtre du duc. On disait même qu’il conservait comme un monument précieux l’arme dont il s’était servi en cette occasion. Il protesta toujours qu’il n’avait eu aucune part à ce guet-apens. Barbazan, qui fut accusé de l’avoir conseillé, quoiqu’il ne fît point partie des dix seigneurs qui accompagnaient le dauphin sur le pont, non seulement s’en défendit, mais, selon quelques relations, il déclara hautement qu’on avait perdu et déshonoré le dauphin, en voulant le servir.

    On s’efforça de persuader à la nation que le duc de Bourgogne avait menacé et insulté le dauphin, et qu’il n’avait fait que porter la peine de son insolence, et l’on engagea le jeune prince à déclarer ce fait dans un manifeste.

    Le premier soin du parti du dauphin, après l’assassinat de Jean Sans-Peur, fut de chercher à soumettre le château de Montereau occupé par les Bourguignons. Vergy, un des seigneurs de la suite du duc, fut conduit au pied des murailles, et on le chargea de signifier à la garnison de se rendre. Le gouverneur du château demanda un ordre écrit du duc de Bourgogne.

    Vergy, n’osant dire que ce prince venait d’être assassiné, de peur d’irriter les gens du dauphin, dont il était le prisonnier, se borna à quelques gestes significatifs. Le gouverneur ne comprenant point, ou feignant de ne pas comprendre ces signes, Vergy s’expliqua plus clairement. Le défaut de vivres entraîna seul la capitulation du château. Les succès du dauphin se bornèrent à cette mince conquête.

    Philippe, comte de Charolais, nouveau duc de Bourgogne, avait à venger son père ; Isabelle de Bavière avait, pour la troisième fois, à venger un ami, et, pour la seconde fois, à se venger d’un fils. Anglais, Bourguignons, Français, tout se réunit contre le dauphin.

    Les Parisiens, généralement affectionnés au parti bourguignon, envoyèrent le président Morvilliers au duc Philippe, pour assurer ce prince de leur fidélité, et l’exciter à la vengeance. Ce dernier point était inutile ; Philippe, après avoir fait célébrer les funérailles de son père avec la plus grande pompe, convoqua une assemblée à Arras, où tous les députés des villes qui étaient dans ses intérêts, s’obligèrent unanimement à le servir contre le dauphin (qu’ils ne nommaient plus que le comte de Ponthieu), lui donnèrent la régence du royaume, et lui conseillèrent de traiter avec le roi d’Angleterre, qui déjà lui offrait son secours. Le duc se rendit sans peine à ce dernier avis, et courut ensuite à Troyes se saisir des personnes du roi et de la reine, qui l’attendait avec impatience.

    Alors se forma cette ligue funeste, qui fut sur le point de renverser la monarchie. Des ambassadeurs anglais se rendirent à Troyes, et conclurent un traité, dont les conditions furent qu’Henri V épouserait la princesse Catherine, fille du roi ; que Charles VI jouirait pendant sa vie du titre et des honneurs de roi de France ; qu’Henri serait reconnu et déclaré héritier de cette couronne, et prendrait, dès ce moment, les rênes du gouvernement ; que ce royaume passerait à ses héritiers ; que la France et l’Angleterre resteraient à jamais unies sous un même monarque, mais qu’elles garderaient chacune leurs lois, leurs coutumes et leurs priviléges ; que tous les princes, les pairs, les vassaux et communautés de France, jureraient à la fois de consentir à la succession future d’Henri, et de lui obéir comme régent ; qu’il joindrait ses armes à celles du roi Charles VI et du duc de Bourgogne, pour combattre les adhérents de Charles, prétendu dauphin, et que ces trois princes ne feraient ni paix, ni trève avec ledit Charles que d’un commun accord.

    Dès que le dauphin eut connaissance de ce traité, il prit aussi, de son côté, le titre de régent, et se recommanda à Dieu et à son épée. La guerre fut déclarée entre lui et Henri V.

    Après la célébration du mariage de Henri V avec Catherine de France, les deux rois et le duc de Bourgogne se rendirent à Paris, en s’emparant, chemin faisant, des places de Sens, de Montereau et de Meaux. Celle de Melun fut défendue pendant quatre mois, avec autant de valeur que de constance, par les seigneurs de Barbazan et de Préaux, et la famine put seule les forcer à capituler sous des conditions très dures.

    Le roi d’Angleterre fit, dans la capitale, l’entrée la plus magnifique et la plus triomphante qu’on eût vue depuis longtemps. Les Parisiens ne rougirent pas de célébrer, par des fêtes et par les témoignages de la plus vive allégresse, le déshonneur de la France. Tous les ordres de la ville allèrent au-devant des deux rois et du duc de Bourgogne, et leur offrirent de riches présents.

    Mais tandis qu’Henri V prenait ainsi possession de la France, les cœurs de ses sujets se détachaient de lui. Calmes dans leur île, à l’abri des tempêtes qui bouleversaient la France, sans autres passions qu’une haine tranquille et systématique pour une nation rivale, les Anglais voyaient leurs intérêts mieux que leur prince. Ils voulaient bien que la France fût affaiblie et humiliée, mais non pas qu’elle fût conquise. Ils sentaient que leur pays pouvait ne devenir qu’une province de l’empire français. Ils avaient paru d’abord contents de prendre les armes contre la France, ils avaient contribué avec ardeur aux premiers succès.

    Mais, alarmés de la rapidité et de la continuité de ces mêmes succès, leur zèle se refroidit ; ils n’accordèrent que des subsides peu proportionnés à une si vaste entreprise. Ce fut donc avec le secours des provinces qu’il avait conquises d’abord en France, qu’Henri V se mit en état de soumettre les autres. Et, ce secours ne lui suffisant pas , il fut quelquefois obligé, pour entrer en campagne, de mettre en gage ses pierreries, et même sa couronne. D’autres fois, il fallut qu’il s’arrêtat au milieu de sa course, qu’il suspendît ses conquêtes, qu’il accordât des trèves.

    Sur ces entrefaites, le dauphin ou plutôt la France, fut secourue par une ancienne alliée, l’Ecosse, qui semblait hors d’état de faire aucune tentative. Sans être plus éblouis que les Anglais des conquêtes d’Henri V, les seigneurs écossais devaient en être plus mécontents encore.

    Jacques Stuart, héritier légitime de la couronne d’Ecosse, était retenu en Angleterre, au mépris du droit des gens ; le duc d’Albanie, son oncle et son persécuteur, gouvernait le royaume sous le titre de régent. Ce prince ambitieux, jaloux de conserver son autorité, ménageait l’Angleterre, de peur qu’Henri V ne renvoyât Jacques en Ecosse ; l’inaction du duc d’Albanie pendant la guerre d’Henri avec la France avait favorisé les succès de celui-ci.

    En voyant la France passer sous le joug du roi d’Angleterre, et les Ecossais alarmés de cet accroissement d’une puissance ennemie, le régent d’Ecosse sentit que, dans son propre intérêt, il devait faire à son pays le sacrifice des considérations qui l’avaient déterminé jusqu’alors. Sans entrer en guerre ouverte avec l’Angleterre, il fit passer en France, sous la conduite du comte de Buchan, son second fils, un corps de sept mille hommes pour secourir le dauphin.

    Au milieu de l’avilissement de la France, il restait encore des citoyens fidèles et courageux. Les provinces au-delà de la Loire s’étaient déclarées en grande partie pour le dauphin. Beaucoup de seigneurs, par zèle autant que par politique, avaient levé leurs bannières en faveur de ce prince.

    Plusieurs magistrats et plusieurs docteurs s’étaient rendus de Paris à Poitiers, au péril de leur fortune et même de leur vie, et y avaient rétabli des simulacres de parlement et d’université.

    Dans le même temps, Henri V fit un voyage en Angleterre. Suivant quelques historiens, il voulait montrer à ses sujets sa nouvelle épouse, et se parer à leurs yeux de la couronne rivale ; selon d’autres, il allait chercher des secours qui lui étaient nécessaires.

    Quoi qu’il en soit, il nomma, en partant, le duc de Clarence, son frère, lieutenant-général du royaume français. Ce prince, brûlant du désir de signaler son gouvernement temporaire par quelque exploit remarquable, ne tarda point à se mettre en campagne avec une armée nombreuse.

    Après avoir ravagé le pays Chartrain, le Vendomois et le Maine, le duc de Clarence vint camper devant Angers. La prise de cette place importante ouvrait aux Anglais la conquête de la Touraine, du Poitou et de l’Orléanais, que le dauphin eût été forcé d’abandonner pour se réfugier en Auvergne. Mais le frère d’Henri V, apprenant que le prince français s’avançait pour le combattre, résolut de le prévenir, en marchant lui-même sur Baugé, où se trouvait en ce moment son adversaire.

    L’armée française se composait de troupes nationales, sous les ordres du maréchal Gilbert de La Fayette, un des principaux seigneurs de l’Auvergne, et des sept mille Ecossais, commandés par le comte de Buchan.

    Le duc de Clarence, en se présentant devant cette armée, qu’il croyait surprendre, fut bien étonné de la trouver sous les armes. Le combat s’engagea ; il fut sanglant et opiniâtre. Le succès, dans une mêlée douteuse, était vivement disputé, lorsque le prince anglais fut tué par un chevalier écossais nommé Swinton.

    La mort du duc de Clarence ébranla ses troupes, et la victoire se décida en faveur du dauphin. Les Anglais prirent la fuite, laissant entre les mains des vainqueurs bon nombre de prisonniers, et sur le champ de bataille près de trois mille morts. Le siège d’Angers fut levé, et l’armée vaincue prit le chemin de la Normandie, emportant avec elle le corps de son général, qui fut, peu de temps après, envoyé en Angleterre pour y recevoir la sépulture.

    Ce succès brillant et inespéré, encouragea, accrut le parti du dauphin, et prouva que les Anglais pouvaient être vaincus. Le dauphin, pour mieux attacher les Ecossais à son service, fit le comte de Buchan son connétable, et choisit parmi eux un certain nombre de chevaliers, dont il forma une compagnie d’ordonnance, à laquelle il confia la garde de sa personne.

    Le comte de Buchan justifia la confiance du dauphin par de nouveaux exploits. Il s’empara de plusieurs petites places en Normandie, et remporta près d’Alençon un avantage considérable. Dans le même temps, plusieurs seigneurs, dont les noms acquirent depuis une grande célébrité, tels que La Hire, Xaintrailles, Gaucourt, Gamache, d’Offemont, se distinguaient en Picardie, au service du légitime héritier de la couronne.

    A la nouvelle de l’échec de Baugé et du progrès des armes du dauphin, Henri V revint en France avec vingt-huit mille hommes. Il obligea le jeune prince à lever le siège de Chartres, et à se retirer de l’autre côté de la Loire. Il obtint ensuite quelques autres succès ; mais, éprouvant les premières atteintes du mal qui devait le conduire au tombeau, il se rendit à Paris, après avoir remis le commandement de ses troupes aux ducs de Bedfort et de Glocester, ses frères.

    La mort vint frapper ce monarque à l’âge de trente-six ans, et au milieu de ses prospérités. Henri V mourut de la fistule, qu’on n’avait pas alors l’art de guérir. Avant de rendre le dernier soupir, il donna au duc de Bedfort la régence de France, au duc de Glocester celle d’Angleterre, pendant la minorité de son fils, Henri VI, dont il confia la tutèle au comte de Warwick, ne voulant pas que ces deux fonctions de régent et de tuteur fussent réunies en la même personne.

    Il recommanda surtout à ses deux frères de persévérer dans l’alliance du duc de Bourgogne, persuadé que les Anglais ne pouvaient avoir, de succès solides en France, que par la division des Français.

     

     

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