Le combat de Rouvray ou la journée des harengs
D’après « Victoires, conquêtes, désastres, revers et guerres civiles des Français » – 1822
Le comte de Clermont, à la tête d’un corps de quatre mille hommes et plus, rencontra le convoi anglais, le 12 février, à cinq heures du soir, auprès du village de Rouvray-Saint-Denis, à quelques lieues d’Orléans.
Le capitaine Fastol fit preuve, en cette occasion, d’une intelligence et d’une capacité militaire peu commune dans les guerriers du temps. A l’approche de la troupe française, il rallia son escorte, la forma en bon ordre, réunit tous les charriots du convoi pour en faire un retranchement, aux issues duquel il plaça ses meilleurs archers, et couvrit ceux-ci par une palissade de pieux ferrés, fichés en terre par l’autre bout, de manière à pouvoir arrêter les premiers efforts de la cavalerie.
Les Français, au contraire, sans considérer l’inconvénient d’en venir aux mains après la chute du jour, sans faire aucune disposition préparatoire, sans user de la moindre précaution, attaquèrent avec leur impétuosité et leur indiscipline accoutumées, et éprouvèrent aussi le même sort qu’aux batailles précédentes.
La plupart des chefs et une partie des soldats furent tués, les autres se dispersèrent, à l’exception d’un petit corps de quatre à cinq cents hommes d’armes, que Dunois, blessé grièvement dans l’action, et quelques officiers, parvinrent à ramener dans Orléans. On évalue le nombre de ces morts à cinq cents.
On nomma ce combat la journée des harengs, parce que le convoi anglais consistait principalement en barils remplis de ces poissons salés.
Le combat de Rouvray, malgré son peu d’importance, quant au résultat matériel, faillit entraîner la perte de la monarchie. Il enlevait au roi le reste de sa faible armée, il décourageait ses partisans, il amenait la réduction d’Orléans.
Les habitants de cette ville, près d’éprouver toutes les horreurs de la famine, n’espérant plus leur délivrance d’un prince, qui lui-même conservait à peine une ombre de royauté, résolurent de mettre la place en dépôt entre les mains du duc de Bourgogne. Leurs envoyés, du nombre desquels était Xaintrailles, se rendirent près du duc, qui agréa d’abord la proposition, et les conduisit à Paris, dans le dessein d’engager le duc de Bedfort à ratifier cet arrangement. Mais le régent répondit que la ville ne serait reçue à traiter, qu’à la condition de se soumettre aux Anglais. La négociation fut rompue, et les Orléanais ne prirent plus conseil que de leur patriotisme et de leur courage résigné.




