D’après « Biographie universelle (Michaud), ancienne et moderne » – 1854
Général français, né à Ville-sur-Saulx (Meuse) le 10 mai 1766.
Il finissait des études classiques et se préparait à suivre un cours de théologie, lorsque la révolution éclata et lui ouvrit une autre carrière.
Il s’engagea volontaire le 6 septembre 1791 au 3e bataillon des volontaires de la Meuse. Elu capitaine, il se rendit à l’armée de Trêves, commandée par le général Beurnonville, et contribua, par sa courageuse énergie, à la prise des retranchements de Wavren.
Il fut nommé chef de bataillon dans les premiers mois de 1794, et, pendant les campagnes de 1795 et 1796, il montra à la fois une audace extraordinaire et une fermeté inébranlable. Il se fit remarquer notamment au combat d’Amberg à l’armée de Sambre et Meuse, et à l’armée d’Italie au combat de la Stupizza et à l’assaut de la Chiusa. Bonaparte, alors général en chef, le nomma colonel sur le champ de bataille.
L’an VII, à l’armée de Naples, attaqué près de Bénévent, par un corps de 10 000 hommes, et n’ayant avec lui que la dix-septième demi-brigade et trente-six chevaux, Broussier dressa une embuscade aux Fourches-Caudines, dans le lieu même où les Romains passèrent sous le joug des Samnites ; il y attira l’ennemi, le tailla en pièces et le dispersa. Le grade de général de brigade fut le prix de cette action.
Broussier ne se distingua pas moins à la prise de Naples. Chargé de diriger une des colonnes d’attaque, il pénétra dans la ville après un combat opiniâtre, enleva le pont de la Madeleine, fit mettre bas les armes aux troupes albanaises et s’empara du fort des Carmes. Il fut envoyé ensuite contre le cardinal Ruffo qui avait fait insurger la province de la Pouille et menaçait les derrières de l’année. Andria fut prise de vive force, et Trani, qui avait une garnison de 8 000 hommes et cinquante pièces de canon sur ses remparts, emportée d’assaut. Barri fut débloqué, l’ennemi battu à Egli et à Montrone. En quinze jours, l’armée de Ruffo fut anéantie, 80 000 insurgés soumis, et tout le pays pacifié.
Le directoire décerna des armes d’honneur à Broussier ; mais celui-ci ne les reçut pas, et partagea la proscription dont la haine du commissaire civil enveloppait le général en chef Championnet et son état-major.
Au commencement de l’année 1800, Broussier commandait une brigade dans l’armée qui devait triompher à Marengo. Chargé d’observer et de contenir un corps de troupes ennemies qui se trouvait derrière l’Adda, il le battit à Cava et Aspinadi, et dirigea près de Crémone une brillante charge de cavalerie.
Gouverneur pendant les années 1801, 1802 et 1803, d’abord de la place de Milan, ensuite du duché de Parme et de Plaisance, il fut appelé, en 1804, au commandement de Paris.
Dans le cours de l’année 1805, il devint successivement général de division, commandeur de la Légion d’honneur, puis chef d’état-major général de l’armée du Nord.
En 1809, lorsque l’Autriche reprit les armes contre la France, Broussier était à la tête d’une division de l’armée d’Italie.
Le 16 avril, le vice-roi fit attaquer l’ennemi entre Fontana-Fredda et Pordenone. Cette attaque ne fut pas heureuse : les Français furent repoussés, et eussent été culbutés dans la Livenza sans une habile manœuvre du général Broussier, qui prit l’ennemi en flanc et assura la retraite de l’armée. Le général rendit encore d’importants services à la bataille de la Piave ; il força les défilés de Préwald, fit le blocus du château de Gratz, et battit plusieurs fois les généraux Giulay et Chasteler. Ce fut dans une de ces rencontres que deux bataillons du 84e régiment livrèrent le célèbre combat qui leur valut la devise un contre dix. Par ordre de l’empereur, ce glorieux témoignage d’un brillant fait d’armes fut inscrit sur leur drapeau.
Le 1er juillet, Broussier opéra sa jonction avec le corps d’armée du fgénéral Marmont. II arriva le 5 à Wagram, y combattit le 6 et s’y couvrit de gloire. Tel fut le témoignage de Napoléon qui le créa comte de l’empire et grand officier de la Légion d’honneur.
Broussier fut, à cette époque, envoyé pour pacifier le Tyrol qui continuait à faire la guerre. A peine parut-il dans la vallée de Lintz, foyer de l’insurrection, qu’il déploya son énergie accoutumée et que tout rentra dans l’obéissance.
En 1812, le général Broussier, que le vice-roi aimait à avoir toujours à ses côtés, reçut un commandement dans le 4e corps de la grande armée. Sa division formait la première ligne au combat de Wilepsk, et eut la gloire de cette journée. A la bataille de la Moscowa, elle contribua puissamment à l’enlèvement de la grande redoute, en repoussant les masses que les Russes envoyèrent pour reprendre ce boulevard de leur position. Elle se distingua à Maloïaroslawetz, et réduite à de faibles débris, elle soutint encore avec vigueur le choc de l’armée ennemie à Krasnoï. Les services du général furent récompensés par le titre de commandeur de l’ordre de la Couronne de fer.
Rentré en France au commencement de 1813, le comte Broussier sentit ses forces l’abandonner et sa santé décliner. Il prit néanmoins, sur l’ordre de Napoléon, le commandement supérieur de Strasbourg et du fort de Kelh, qu’il sut défendre et conserver jusqu’à la paix.
En 1814, le nouveau gouvernement pensa à le nommer ambassadeur en Russie pour négocier l’échange des prisonniers. Mais il demanda à se retirer dans son pays natal afin d’y rétablir sa santé. Louis XVIII, pour condescendre à ce désir, le fit chevalier de St-Louis et commandant du département de la Meuse.
A peine était-il arrivé à Bar-le-Duc, qu’il mourut d’une attaque d’apoplexie, le 13 décembre de cette même année 1814. Sa fille unique lui a fait élever un tombeau dans cette ville.
Une audace qui bravait tous les obstacles, un sang-froid qui trouvait des ressources inespérées, une détermination de volonté et une énergie d’exécution incroyables, établirent la réputation militaire du lieutenant général comte Broussier. Du reste, comme il avait une austérité, une indépendance et une fierté de caractère qui ne savaient ni s’abaisser, ni flatter, il déplut souvent et ne dut jamais rien à la faveur.