A partir d’un bref historique du 12° Régiment de Cuirassiers dans lequel j’ai servi en qualité de Brigadier-Chef,
je voudrais évoquer, le cheminement, de l’un de ses chefs, le Lieutenant-Colonel Marc Rouvillois.
Le 12° Régiment de Cuirassiers reformé en Algérie le 16 Septembre 1943, intègre la 2° Division Blindée du Général Leclerc, rejoint l’Angleterre en Avril 1944, et le 1er Août 1944, débarque en Normandie. Première victoire à Alençon le 12 Août 1944, bataille de Paris le 27 Août 1944, puis campagne des Vosges du 16 Septembre au 3 Novembre 1944.
Sous les ordres du Lieutenant-Colonel Rouvillois, le régiment parvient à Rauwiller et Petite-Pierre le 21 Novembre 1944. Le 22, il atteint Detwiller et le 23 Novembre 1944, il entre dans Strasbourg. L’Etendard du 12° Régiment de Cuirassiers est le premier à flotter dans la ville. C’est le char moyen « Evreux » de l’escadron Briot qui entre le premier dans la ville.
Puis ce sera le front de l’Atlantique à Royan, et enfin la campagne d’Allemagne du 25 Avril au 25 Octobre 1945. Le 23 Mai 1946, le 12° Cuirasssiers est affecté à la 5° Division Blindée, il prend garnison en Allemagne à Tubingen.
Rappel de la bataille d’Epinal en Juin 1940
En tant que Spinalien, en m’inspirant du livre de Roger Bruge, je voudrais retracer l’activité du capitaine Marc Rouvillois, lors de la défense d’Epinal en Juin 1940.
Les 18 et 19 Juin 1940, en reconnaissance sur la position affectée à son escadron motorisé, dans le « guêpier d’Epinal », le Capitaine Rouvillois se rend à la mairie, prend conscience du désordre dans lequel son escadron motorisé vient de se jeter.
« La tenue infâme de la majorité des hommes que je rencontre en ville, débraillés et ivres, l’absence de tout élément de défense sur les ponts non sautés » écrit-il dans son rapport, « me prouvent que le commandant d’armes n’a absolument pas en mains les éléments dont il dispose, et est incapable d’assurer la défense de la ville ». Le général Fournier et « les éléments dont il dispose » ont quitté la ville au premier fusant tiré sur celle-ci.
Dans la nuit qui blanchit, à l’approche du jour, l’escadron Rouvillois s’organise dans les immeubles bordant la Moselle : il tient sous son feu la passerelle du cours et le pont de la bibliothèque. Chez Rouvillois, les hommes ouvrent des créneaux dans le mur ouest du parc de la Préfecture.
Vers 4 heures du matin, le jour étant levé, le brigadier-chef Bouley et les cavaliers Malgras et Faron posent des mines antichars sur le pont de Pierre. Rouvillois estime que la mise en place de son escadron est pratiquement terminée.
Témoignant d’un moral exceptionnel, il ajoute : « Il y a huit jours, nous avons promis un insigne spécial à tout homme qui détruirait un char, le moment va probablement sonner ».
Vers 6 heures, selon le rapport du capitaine Rouvillois, quelques véhicules chenillés s’arrêtent à la hauteur du pont de la bibliothèque et les fantassins qu’ils transportent sautent à terre.
Du parc de la Préfecture, le canon de 25 du maréchal des logis Noblet se fait entendre, sa voix imitée aussitôt par les mitrailleuses qui l’accompagnent. Deux véhicules chenillés brûlent et sept à huit hommes restent à terre, écrit Rouvillois.
Un Panzer III tente de s’approcher du quai, mais sous les coups de 25 de Noblet, il pivote sur place, après une brève riposte de son 37 de tourelle et s’éclipse derrière le pâté de maisons.
Dix minutes plus tard, un autre Panzer, peut-être le même, descend prudemment la rue Léopold-Bourg et s’arrête devant la maison Peiffer sur le quai Boyé, le chef de char a-t’il aperçu les mines ? Son 37 tire cinq ou six projectiles…
Le blindé traverse le quai et s’apprête à monter sur le pont. En position dans l’entrée du lycée, le 25 du maréchal des logis Schillé le prend pour cible. En trois coups tirés à courte distance, il immobilise le Panzer qui commence à brûler.
Un bras horriblement mutilé, l’Oberfeldwebel Kryssmann sort de la tourelle en aidant Rohleder, le conducteur. Le Unteroffizier Dröge a été tué, mais le Gefreiter Pinke, griévement atteint lui aussi, réussit à se traîner jusqu’à une cave où les brancardiers le découvriront six heures plus tard.
Lorsque les munitions des armes de bord commencent à exploser, elles communiquent le feu au magasin Peiffer et l’incendie s’étend bientôt à l’immeuble tout entier.
Dans la gare où se trouve son PC avancé, l’Oberst von Esebeck est surpris par le mordant de son adversaire. Ses premiers messages radio au PC de la 6° Panzer témoignent des difficultés qu’il rencontre. Depuis la destruction du Panzer de Kryssmann, les Allemands semblent avoir renoncé à franchir le pont de Pierre.
Les chars ont changé de tactique. Au lieu de s’avancer et de tenter le passage, ils s’approchent du bout de la rue, font un mètre ou deux et « lâchent » brutalement cinq ou six coups sur l’objectif qu’ils ont repéré antérieurement. Puis ils reculent et disparaissent…
Les premiers incendies se déclarent dans les immeubles où sont retranchés les cavaliers, à la Caisse d’Epargne et au Crédit Lyonnais en particulier.
On entend les explosions sourdes des minem et des tirs des armes automatiques qui s’amplifient.
A l’escadron Rouvillois, les choses vont mal, car depuis la destruction du canon de Noblet, un Panzer IV, sur le blindage duquel ricochent les balles, tire ses projectiles à bout portant sur les créneaux du parc de la Préfecture. Mitrailleuses Hotchkiss contre Panzer IV, le duel est trop inégal…
La première mitrailleuse ne tire plus, les hommes blessés sont évacués sur le poste de secours. La troisième mitrailleuse brûle les bandes à l’économie puis son servant Malleval s’écroule tué net. Rouvillois se déplace à grandes enjambées dans le parc, et c’est à peine s’il marque un léger temps d’arrêt, lorsqu’un minem projette ses éclats meurtriers. « Il a la baraka » disent ses hommes. On a remarqué qu’au moment où le lieutenant Janson a été blessé, Rouvillois a été projeté au sol, mais sans une égratignure…
Au poste de commandement à la mairie d’Epinal, le chef d’escadron Degatier est amer : le feu de l’escadron Rouvillois faiblit, aucun renfort ne lui est envoyé et la relève prévue n’aura jamais lieu.
Le GRDI 46 doit-il se battre jusqu’à complète destruction ?
« Ma dernière mitrailleuse est servie par un volontaire, le maréchal des logis Adam » rapporte le capitaine Rouvillois, mais l’ennemi a pris pied sur la rive droite de la Moselle, au sud de la Préfecture...
Sans se consulter, Rouvillois et son supérieur Degatier aboutissent à la même conclusion : il est impossible de tenir plus longtemps les berges de la Moselle dans la traversée d’Epinal. Trop de morts, trop de blessés, d’armes détruites et la certitude de ne pas être relevé par le commandement. Un décrochage est nécessaire, Rouvillois est talonné par l’ennemi.
A l’abri d’un mince rideau défensif qui brûle ses dernières cartouches, les pelotons du GRDI 46 évacuent la zone des quais où brûlent les immeubles. Une demi-heure plus tard, le pont de Pierre est entre les mains des allemands.
Le capitaine Rouvillois rejoindra la 2° DB du Général Leclerc, en qualité de Lieutenant-Colonel à la tête du 12° Régiment de Cuirassiers, il sera le premier à entrer dans Strasbourg.
Je suis fier d’avoir servi dans son régiment. Avec mon plus profond respect pour le Lieutenant-Colonel Rouvillois, qui a terminé sa carrière comme Général de brigade en 1954….
Un Spinalien G. THIRIOT.
Brigadier-Chef au 12° Régiment de Cuirassiers.
Georges Thiriot on 4 février 2011
Je voudrais préciser, en ce qui concerne le char allemand détruit sous le nom de : PANZER III, qu’il s’agissait, en fait,
d’un char de fabrication tchéque des usines SKODA : LTvz 35 utilisé par les allemands sous le nom de : PANZER 35(t).
La lettre « t » indique la provenance tchéque.
La 6° Panzerdivision en était équipée, en partie, en 1940.
C’était un engin de : 10 tonnes 5, blindé à 25mm, armé d’un canon de: 37.2mm avec mitrailleuse sous tourelle et mitrailleuse de capot de: 7.92mm.
Il était servi par un équipage de quatre hommes.
Joël Grisward on 9 février 2014
Une « Histoire des Vosges » de 1954 et » Épinal en images » de l’abbé Javelet mentionnent, au 18 juin 1940, « l’aviation [allemande] bombarde la ville ».
Y a-t-il eu réellement un bombardement d’Épinal par des avions allemands le 18 juin 1940 ? Et quels en furent les dégâts?
Georges Thiriot on 27 février 2014
le 18 Juin 1940, pas d’aviation, seule l’artillerie allemande bombarde la ville d’Épinal, sur la rive droite de la Moselle, défendue
par le Capitaine Marc Rouvillois où ses hommes sont retranchés.
Des incendies se déclarent, en particulier, à la Caisse d’Epargne, le Crédit Lyonnais et le Lycée de garçons.
Une salve de 105 des allemands éclate rue Lormont, un des projectiles tombant dans la cour de l’école, à deux pas d’un abri dans
lequel se trouve plusieurs personnes.
L’obus fait cinq morts et une douzaine de blessés : Mademoiselle Calmés, les pompiers Baret et Hammerer, Mrs Robert et Vautrin sont tués.
Parmi les blessés : monsieur Mangin, monsieur Lavigne, messieurs Fombaron père et fils, messieurs Renard, Biron, Billotet,
le lieutenant des pompiers Bertrand et trois de ses hommes : Sourdot, Franoux et Munier.
Georges Thiriot on 27 février 2014
pour répondre à la question : l’aviation allemande bombarde la ville
A ma connaissance, de citer les bombardements de l’aviation allemande, de Mai et Juin 1940, au plus prés d’Epinal:
L’attaque de l’aérodrome de Dogneville, le 11 Mai 1940 vers 17 heures par six BF 109 allemands, en vol rasant d’où :
trois mécaniciens blessés et un appareil Potez détruit.
Le bombardement le 11 Juin 1940 par l’aviation allemande du Viaduc de Bertraménil.
THIRIOT Georges on 6 mars 2014
Pour en revenir à l’attaque de l’aérodrome de Dogneville,du 11 Mai 1940 par six avions allemands.
Il convient de préciser qu’il s’agissait de Messerschmitt BF 109, avion de chasse le plus répandu de la Luffwaffe, en service
de 1937 à 1965.
Marion Girault on 26 juin 2019
Bonjour,
mon arrière grand père a participé à cette bataille. Seulement je n’ai aucune information sur son régiment. Je sais juste qu’il a été capturé juste après ainsi que son matricule en Allemagne.
Il s’appelait François Girault, il venait de Mayenne (53). Si vous avez une quelconque information cela m’aiderai beaucoup.
Je vous remercie.
Alban Sanz on 20 janvier 2020
Bonjour,
mon grand-père paternel, un républicain espagnol, faisait partie de la 11ème compagnie de Travailleurs Etrangers (C.T.E) qui s’était replié de Gorzes en Mosulle sur Epinal suite au début es combats (les C.T.E n’étaient pas des compagnies armées). C’est là qu’il fut fait prisonnier (puis ensuite déporté) en essayant de prendre un train qui fut bombardé. Cet épisode du train j’en ai entendu parlé, mais n’ai jamais eu de preuves formelles. Auriez vous des informations à ce sujet?
D’avance merci.
Sébastien Boeuf on 12 avril 2020
Bonjour.
Concernant le bombardement par l’aviation allemande de l’aérodrome de Dogneville en 1940, je me souviens que mon père m’a dit qu’il avait été fait par des Stukas. Je me rappelle qu’il avait évoqué cet épisode avec sa sœur (ma tante) et qu’ils se souvenaient encore des sirènes de ces avions lors des piqués. Ainsi que leur refuge pour se protéger dans l’église de Golbey, où l’abbé du moment faisait chanter des chants religieux, dont : « Seigneur, seigneur, veuillez sauver la France » , ou similaire… Aussi ce Stuka abattu par un tir de canon antiaérien basé vers l’ancienne caserne d’aerostation de Golbey. Tant de précisons restées dans les souvenirs viennent un peu contredire une attaque aérienne par Bf109. Bref, je ne peux plus leur demander de debatttre à ce sujet aujourd’hui…
Bien à vous.
Sébastien.
Sophie Javerzat on 6 juin 2024
Mon père, à l’époque Lieutenant Georges Raymond dans la cavalerie, était au niveau de la préfecture avec environ 80 hommes, dans la nuit du 19 juin. Il a été gravement touché par une mitrailleuse dans l’après-midi en tentant de retrouver le Commandant dont ils avaient perdu la trace.