C’est à Gerbéviller, la petite ville si cruellement ravagée par les Allemands, que s’est déroulée cette scène.Un escadron de chasseurs passe…
Devant une des rares maisons restées debout au milieu des ruines, où flotte le drapeau de la Croix-Rouge, le capitaine demande :
« Sœur Julie ?… ».
Elle parait.
« Ma sœur, nous allons vous demander une faveur… Permettez-nous de défiler devant vous… Mais si, mais si… cela nous ferait tant de plaisir ! Voulez-vous vous mettre là, vous allez voir ! ».
Et, se tournant vers l’escadron, il dit :
« Mes amis, vous vous en souvenez, lorsque nous les avons arrêtés près d’ici le 25 août… Nous avons vu, de ce côté, de grandes flammes qui montaient dans le ciel… Vous voyez ce qu’ils faisaient.
Eh bien ! Dans le village évacué, au milieu des incendies, sous les obus et sous les balles, même après le départ de l’héroïque section de nos chasseurs à pied qui a tenu si longtemps le pont, un contre dix, une femme est restée là… à son poste de charité, relevant les blessés, se prodiguant à tous. C’est sœur Julie… La voici !
Le président de la République vient d’attacher à sa guimpe, la Croix des Braves… Saluons-la !
Et maintenant, nous allons avoir l’honneur de défiler devant elle. Elle le permet.
Vers la gauche… pour défiler ! ».
Le capitaine salue largement du sabre, et devant la sœur émue, fixant sur elle leurs clairs regards, impécablement alignés, sabre à la main, officiers et cavaliers, ceux que les Allemands ont appelés naguère les « diables bleus », les chasseurs défilent.
D’après un article du « Petit Journal » supplément illustré du dimanche 24 janvier 1915.